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Les soldes d'été révèlent la détresse du commerce de proximité

Publié par Jérôme Pouponnot le - mis à jour à

À l'occasion de l'ouverture des soldes d'été 2025, le Syndicat des Indépendants et TPE dresse un constat alarmant de la situation du commerce de proximité français. L'enquête menée du 16 au 18 juin auprès de 803 commerçants révèle une détresse économique généralisée.

68 % des commerçants déclarent rencontrer des problèmes de trésorerie. Cette situation critique s'explique par la conjonction de plusieurs facteurs défavorables : charges fixes en hausse constante, fréquentation en baisse et diminution significative des paniers moyens. Pour les petits commerçants, cette pression économique constante génère une perte de sérénité et une inquiétude persistante quant à la viabilité même de leurs activités.

Des soldes vidées de leur sens commercial

Traditionnellement considérées comme une période stratégique de déstockage de fin de saison, les soldes ont perdu leur fonction initiale selon les commerçants interrogés. Les chiffres sont édifiants : 61 % estiment que les soldes n'ont plus d'intérêt commercial réel, tandis que 60 % ne les pratiquent que par obligation concurrentielle.

Cette déconnexion se traduit par une escalade des remises dès l'ouverture : 50 % des répondants démarrent leurs soldes à -30 % ou plus, et 20 % augmentent encore leur niveau de remise cette année. Paradoxalement, seuls 40 % espèrent que cette période leur permettra de reconstituer leur trésorerie, révélant l'inefficacité croissante de ce mécanisme pour les petits commerces.


L'e-commerce chinois, facteur aggravant

Les commerçants pointent du doigt une concurrence qu'ils jugent profondément inéquitable. Le développement de l'e-commerce, notamment via les plateformes chinoises comme Shein ou Temu, constitue un facteur aggravant majeur. L'impact négatif de ces géants sur l'activité commerciale locale est évalué à 7,2 sur 10 en moyenne par les répondants.

Cette distorsion de concurrence s'appuie sur des prix défiant toute concurrence, des délais de livraison très courts et des pratiques marketing agressives. Face à cette situation, les mesures publiques mises en place, telles que la surtaxe à l'import ou l'encadrement de la publicité par influence, sont jugées insuffisantes par 85 % des commerçants interrogés.

Une clientèle transformée par l'inflation

Les comportements de consommation ont profondément évolué, directement sous l'effet de l'inflation et de la montée en puissance du commerce en ligne. 80 % des commerçants attribuent le changement de comportement de leur clientèle à la baisse du pouvoir d'achat, tandis que 66 % observent un désintérêt croissant pour les soldes.

Plus préoccupant encore, la moitié des décisions d'achat dépend aujourd'hui du niveau de la remise plutôt que de la valeur perçue du produit. Cette banalisation des remises, renforcée par les ventes privées et les promotions continues, a profondément modifié le rapport à la consommation et complique la fidélisation de la clientèle.


Un état d'esprit alarmant

Malgré ces difficultés, 95 % des répondants déclarent qu'ils participeront aux soldes cette année, mais cette décision est majoritairement subie. Les commerçants considèrent que les soldes profitent avant tout aux grandes enseignes, capables de maintenir des marges élevées malgré de fortes remises. À l'inverse, les petits commerçants sacrifient leurs marges, parfois jusqu'à vendre à prix coûtant, sans bénéficier d'un effet volume compensateur.

L'enquête révèle un état d'esprit extrêmement dégradé : 91 % des commerçants se disent dans un état d'esprit négatif. Certains témoignages sont particulièrement éloquents : "J'espère tenir mais c'est compliqué quand on doit brader nos produits deux mois après leur arrivée" ou encore "On crève dans l'indifférence".

Un avenir incertain pour le commerce de proximité

Cette situation critique résulte de la combinaison de pressions financières, du sentiment d'injustice face à une concurrence mondiale incontrôlée, de la perte de sens des outils commerciaux traditionnels et de l'absence perçue de mesures efficaces en faveur des commerces de proximité.

Face à ce constat, le Syndicat des Indépendants et TPE appelle à repenser urgemment le modèle économique et réglementaire encadrant l'activité commerciale locale. Sans action rapide, une part significative du commerce de proximité risque de disparaître à court terme, avec les conséquences sociales et économiques que cela implique pour les centres-villes et les territoires.

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