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« Nous avons tout à faire, à inventer, à défricher »

Publié par La rédaction le

Après Avoir dirigé le voyagiste en ligne Opodo pendant sept ans, Petra Friedmann a pris la tête de HomeAway Europe en juin 2009. Elle détaille le modèle de cette plateforme C to C dédiée à la location de vacances.

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Petra Friedmann, Présidente de HomeAway Europe

Pouvez-vous nous présenter le modèle de HomeAway ?

Petra Friedmann : Notre groupe rassemble plusieurs sites internet qui mettent en relation des propriétaires avec des vacanciers à la recherche de locations de vacances. Nous nous positionnons comme un média, c'est donc notre audience qui fait la force de notre modèle. Les propriétaires peuvent acheter des annonces sur nos sites pour mettre leurs propriétés en ligne. Et notre métier consiste à leur amener beaucoup de visiteurs à l'échelle mondiale. 90 % des annonces émanent de particuliers. Le reste provient de professionnels, cette partie de notre activité étant en croissance. Nous sommes une place de marché et, en parallèle, nous développons beaucoup les services. Nous avons un vrai rôle à jouer pour développer ce secteur, qui a longtemps été artisanal, et lui faire une place dans l'industrie du voyage.

Ce modèle est nouveau, répond-il à une demande importante ?

Les choses ont changé depuis le temps où la location de vacances n'était qu'une activité annexe des agences immobilières. HomeAway a été fondé en 2005 par deux Américains qui voulaient partir en vacances et trouvaient que l'offre de location de maisons sur le Web n'était pas très performante. Ils ont ainsi créé HomeAway. L'engouement a été rapide. A l'époque, ils ont levé plus de 400 millions de dollars, ce qui montre que les investisseurs croient en ce modèle.

Sait-on évaluer le potentiel du secteur de la location de vacances entre particuliers ?

Il n'existe pas encore réellement de données sur ce point, car le secteur est en devenir. L'activité est très fragmentée. Le fait que les biens appartiennent à des personnes privées rend les analyses difficiles. Cependant, nous avons commencé à chiffrer le marché aux Etats-Unis, que nous estimons à environ 25 milliards de dollars. L'Europe pesant à peu près le même poids, selon nos estimations. Nous parlons donc d'un marché d'environ 50 milliards de dollars. En 2010, de nouvelles études seront lancées pour affiner ces chiffres.

Votre stratégie de croissance externe est très agressive. Comment procédez-vous ?

HomeAway a racheté, au fur et à mesure, les leaders de la location de vacances dans les différents pays. Nous sommes présents avec trois marques leaders aux Etats-Unis. Nous avons fait l'acquisition de deux sites en Grande-Bretagne ; du leader en Allemagne et d'Abritel, en France, qui est le numéro un de la location de vacances hexagonale. Dernière acquisition, début 2009 : le numéro deux français, Homelidays. Ce site a un positionnement et une clientèle un peu différents. Cela nous permet donc d'avoir une bonne assise sur le marché et une part de marché intéressante. HomeAway a ainsi pu doubler chaque année son chiffre d'affaires, pour moitié grâce aux acquisitions et pour moitié grâce à la croissance organique. Actuellement, nous sommes présents sur deux continents, dans 12 pays et en 11 langues.

Parcours

Petra Friedmann a été nommée présidente de HomeAway Europe en juin 2009. Elle dirige les équipes basées en France, en Grande-Bretagne et en Allemagne et supervise les opérations des sites européens (Abritel.fr, Homelidays.com, Homeaway.com, Ownersdirect.co.uk, Fewo-direkt.de, Homeaway.es, Homeaway.it...). Auparavant, elle assurait la direction générale France de l'agence de voyages en ligne Opodo, qu'elle a en 2002. Elle fut précédemment directrice du site d'enchères en ligne QXL France. Petra Friedmann a débuté sa carrière en Allemagne, en créant une agence de voyages spécialisée dans les vols discount.

Un mot de l'offre disponible sur vos portails ?

Sur nos sites, nous proposons plus de 430 000 propriétés. Et on trouve toutes sortes de biens : châteaux, bateaux, chalets, roulottes, moulins, bungalows... Chaque propriété est différente. C'est très intéressant, nous pouvons offrir beaucoup d'originalité.

Quid du modèle économique, comment fonctionne la plateforme ?

Les annonces s'achètent. Habituellement, pour une durée de 12 mois et pour un coût annuel, en France, de 230 euros. Vous créez votre annonce avec le nombre de photos souhaité et le descriptif voulu. Bien sûr, vous disposez d'une aide en ligne. L'opération peut se faire en une demi-heure depuis chez vous. Ensuite, votre annonce est vue et revue par des milliers d'internautes. Par ailleurs, l'annonce achetée sur le site Abritel, par exemple, est automatiquement diffusée sur tous les autres sites du groupe HomeAway : américains, suédois, finlandais, espagnols, etc.

L'annonce apparaît-elle dans la langue du pays ?

Oui, elle est traduite automatiquement. Les personnes souhaitant bénéficier de traductions plus pointues ou d'une meilleure visibilité ont accès à des options payantes. L'internaute peut ainsi cibler des marchés spécifiques en choisissant ses propres mises en avant.

Quels types de services développez-vous ?

Nous étoffons sans cesse les informations disponibles sur nos sites. Nous créons des moteurs de recherche très sophistiqués. En termes de géolocalisation, il y a tout à faire car vous imaginez que les GoogleMaps ou les cartes de Microsoft, si elles parviennent à localiser des immeubles ou des hôtels, ont encore du mal à trouver la maison d'un particulier. Et pouvoir dire si elle se situe près d'un lac, dans telle rue, ce qu'il y a autour... requiert un ensemble de données beaucoup plus compliqué à restituer. Beaucoup d'erreurs demeurent et nous avons encore un travail de fond à réaliser sur ce point. Nous fixons les bases de ce modèle et nous faisons en sorte d'agréger toutes ces petites unités à un niveau mondial avec un maximum d'informations fiables. Par ailleurs, nous avons recueilli de très nombreux avis de vacanciers, obtenant ainsi la plus grande base de données mondiale d'avis sur les locations de vacances. C'est très important pour la confiance, qui reste un obstacle important pour notre secteur, lequel n'est pas régi par des normes comme pour un hôtel. Nous mettons en ligne le livre d'hôtes qui reprend le mode d'emploi de la maison, les activités, les restaurants alentour, etc. Nous présentons, sur beaucoup de sites, des profils de propriétaires qui racontent l'histoire de leur maison... La vidéo fait également son apparition.

@ Bruno Delessard

Le potentiel de ce marché est-il important ?

La location de vacances est une tendance de fond. J'y crois beaucoup et c'est une des raisons pour lesquelles j'ai changé de métier. Ce n'est pas uniquement parce que je voulais faire quelque chose de plus écolo... J'observe ce secteur depuis un moment et les vacanciers veulent plus de confort, plus d'espace, des prestations moins standardisées. Parallèlement, ils sont avides de contacts authentiques, souhaitent plonger dans de nouveaux environnements, faire des rencontres, des découvertes. C'est une des raisons pour lesquelles, selon moi, ce secteur va continuer de se développer.

Comment se situe la France sur le marché européen ?

En France, le marché est plus mature car les Français ont davantage l'habitude des résidences secondaires, des maisons de famille où l'on invite des amis. Ils sont également plus enclins à l'utilisation de produits «second hand». Des plateformes comme eBay ou PriceMinister marchent bien. On n'a donc pas forcément une réticence pour louer une maison qui appartient à quelqu'un d'autre... Par ailleurs, selon une étude que nous venons de réaliser, les Français privilégient davantage la location de vacances que les Anglais, les Espagnols et les Allemands.

Le modèle est-il financé à 100 % par les recettes liées aux annonces ?

Presque. Nous sommes en train de diversifier un peu notre modèle, comme tous les sites d'e-commerce, et nous étudions les possibilités de revenus complémentaires. Nous faisons un peu de publicité sur nos sites, mais nous restons relativement prudents à ce niveau-là car ce n'est pas notre métier premier. Notre activité consiste véritablement à générer du contact et des réservations pour les propriétaires. Nous ne pouvons donc pas avoir de publicités trop intrusives. Ce que nous développons, en revanche, c'est la créativité au niveau des services. Nous venons, par exemple, de lancer une assurance sur mesure pour le vacancier qui opte pour une location de vacances, car cela n'existe pas. Si un bien n'est pas conforme à sa description, notre assurance peut jouer.

Nous estimons à 50 milliards de dollars le secteur de la location de vacances C to C dans le monde.

Dans le C to C classique, deux écoles existent : les plateformes d'intermédiation pures et celles qui font également office de tiers de paiement. Comment vous situez-vous ?

Nous visons un modèle type eBay, mais n'y sommes pas tout à fait. En effet, le secteur n'en est encore qu'au tout début de son développement. Nous mettons en relation le propriétaire et le vacancier. Ils se parlent, par mail ou par téléphone, et la transaction financière s'effectue ensuite entre les deux parties. Je nous compare parfois aux GDS, les systèmes de réservation qui ont commencé il y a 20 ans à connecter les compagnies aériennes, les hôteliers, etc., aux agences de voyages. Ils ont permis de mettre en relation les fournisseurs et les distributeurs. C'est un peu ce que l'on fait, mais avec la plus petite unité que l'on peut imaginer, c'est-à-dire la maison ou l'appartement individuel.

Home Away

Leader mondial de la location de vacances en ligne, le site propose la mise en relation directe et gratuite (pas de commission pour le vacancier) des propriétaires et des vacanciers. Créé en 2005 à Austin (Texas, Etats-Unis), le site propose près de 430000 offres de location dans le monde en 11 langues. Selon le groupe, en France, 100 000 propriétés étaient disponibles en 2009 (+ 38 % par rapport à 2008). HomeAway Inc. a réalisé environ 120 millions de dollars de chiffre d'affaires (+ 45 % comparé à 2008) et compte 550 personnes, dont 240 en Europe. HomeAway est présent dans 12 pays : Allemagne, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Grande-Bretagne, Italie, Norvège, Pays-Bas, Portugal et Suède.

Quelles sont vos ambitions pour HomeAway ?

Nous avons un plan de développement très important. C'est ce qui est fascinant car, dans le reste du secteur du voyage, tout a déjà été un peu fait, les chiffres ne sont pas très encourageants, ils stagnent... Pour notre part, nous sommes sur un secteur en pleine évolution, nous avons des idées toutes les 10 secondes (rires), nous avons tout à faire, à inventer, à défricher... C'est plutôt cela notre problème, gérer la croissance. Dans le futur, nous mettrons l'accent sur l'élargissement de nos services. Chaque mois, entre 5 000 et 10 000 nouvelles propriétés arrivent sur nos sites et nous devons absolument affiner les critères de recherche disponibles, la géolocalisation. L'expansion géographique sera également un de nos objectifs dans les mois qui viennent. Nous sommes toujours en recherche d'opportunités d'acquisition. Jusqu'à maintenant, chaque année, nous avions une ou deux acquisitions et nous souhaitons poursuivre sur ce rythme.

Quels chiffres pouvez-vous communiquer ?

En 2009, nous avons généré dans le monde 120 millions de dollars de chiffres d'affaires, essentiellement généré par les annonces. Notre croissance, par rapport à 2008, est de + 45 %. Nous sommes rentables et disposons d'une trésorerie très importante. Nous avons donc les moyens d'investir. Pour faire connaître notre plateforme, nous développons de nombreuses actions de marketing. C'est plus difficile de nous faire connaître en Europe, car nous sommes une entreprise multimarque et nous voulons garder ces différentes identités. Abritel, par exemple, a été créée il y a 30 ans, même le Minitel n'existait pas à l'époque ! Ces noms sont connus localement. Aux Etats-Unis, nous avons également réalisé des investissements publicitaires en télé qui nous ont apporté toute satisfaction.

Les réseaux sociaux, comme Trip Advisor, sont de plus en plus présents pour guider le choix des internautes. Ces nouveaux intermédiaires bouleversent-ils la donne ?

Nous sommes un site entièrement 2.0. Tout notre contenu est fait par les internautes. Trip Advisor est le pionnier de l'appréciation et de l'avis. Mais son métier est de monétiser son audience. C'est un média qui génère du trafic par les avis. Dans notre modèle, le contenu créé par les internautes va dans le sens de notre métier. Trip Advisor est un excellent concept et je ne connais que très peu d'internautes qui n'y vont pas avant de réserver une chambre d'hôtel.

Quel est le profil de vos clients ?

Il est à contre-courant du profil de l'internaute lambda : les propriétaires qui ont des biens à louer sont plutôt plus âgés, moins urbains et plus aisés. Nous proposons en ligne plus de 400 000 propriétés à la location dans le monde, il s'agit donc d'individus qui ne se connaissent pas qui louent aux uns et aux autres. Alors que rien n'est réglementé, le taux de satisfaction du côté des propriétaires comme des vacanciers est extrêmement élevé : environ 90 %. C'est quand même un phénomène très étonnant !

Quel est le montant moyen des transactions réalisées sur vos sites ?

On ne le sait pas directement, car nous ne proposons pas le paiement en ligne, mais nous faisons des sondages. En moyenne, un propriétaire gagne entre 12 000 et 13 000 euros par an pour la location d'un bien loué entre 18 et 22 semaines en moyenne, selon les pays. Tant et si bien que certaines personnes, quand elles demandent un crédit à la banque, intègrent dans leur plan de financement les revenus locatifs de leur résidence.

Afin de gérer notre croissance, nous cherchons à affiner les critères de recherche et la géolocalisation.

 
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