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[Portrait] "Bio Veillant"

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[Portrait] 'Bio Veillant'

Serein, posé, déterminé, Pierrick De Ronne poursuit son aventure collective au sein du réseau Biocoop, pionnier du bio en France. Dans un contexte de récession économique et face à un soutien des politiques qu'il juge timide, il reste confiant dans le déploiement de ce modèle vertueux. Très engagé, le jeune président maintient le cap.

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C'est en répondant à une petite annonce que Pierrick De Ronne a rejoint la communauté Biocoop, en 2009. Attiré par le projet et sa structure militante, plus que par la gestion des rayons et la comptabilité, il reprend alors un magasin du réseau en Ardèche, à Annonay, pour le développer. Dix ans plus tard, la Scop Bionacelle regroupe trois magasins et compte 38 salariés. L'alignement entre ses convictions d'entrepreneur-citoyen et les valeurs du groupe est sans doute le moteur de cette réussite.

Installé avec sa femme et ses quatre filles, le cogérant partage aujourd'hui son temps entre ce village de 16 000 habitants et le siège parisien de Biocoop, installé dans un immeuble cossu du 16e arrondissement. Pierrick De Ronne a été élu président de la coopérative Biocoop, en 2019, « un mandat politique, de représentation » , selon l'intéressé, en remplacement de Claude Gruffat, démissionnaire après 15 ans de bons et loyaux services pour s'engager sur la liste d'Europe Écologie Les Verts, aux élections européennes.

Nouvelle étape, nouvelle équipe pour la marque qui doit, en 2023, faire face à un retournement du marché du bio en France. Fin novembre 2022, l'Agence Bio dénombrait 220 fermetures de magasins bio. Pour autant, Biocoop décroît deux fois moins vite que l'ensemble du marché spécialisé, avec une baisse des ventes d'environ 6 % sur l'année 2022, quand les spécialistes chutent en moyenne de 12 %.

Le dirigeant, qui s'est entouré d'un nouveau Dg en 2021, Sylvain Ferry (ex-carrefour), reste confiant, notamment sur le potentiel de croissance du marché. « On enterre un peu trop vite le bio, qui représente 6 % de la consommation en France. N'oublions pas que le bio s'est développé grâce au consommateur qui - pendant 40 ans - a accepté de payer plus cher pour développer ce marché. C'est une façon, pour lui, de voter avec sa carte bleue » , argumente Pierrick de Ronne.

De l'Afrique à l'Ardèche

Pour Pierrick De Ronne, la quête de sens fait partie de ses choix professionnels. L'engagement guide sa vie depuis longtemps. Après ses études en économie et en relations internationales (DU de management des Scop (société coopérative de production) de Dauphine), il part quatre ans en Afrique aux côtés d'ONG dans la coopération internationale où il gère un hôpital au Cameroun. Il retrouve aujourd'hui cet esprit coopératif au sein de Biocoop où il se découvre « une fibre entrepreneuriale » .

Et dès 2011, deux ans après avoir pris ses fonctions de gérant-salarié dans le magasin d'Annonay, il s'investit dans les commissions régionales de Biocoop avant d'entrer, en 2016, au conseil d'administration national. À 41 ans, il est à la tête du premier réseau de magasins bio spécialisés en France avec 762 magasins (1,5 milliard d'euros de CA en 2022). Désormais en charge de l'animation de la coopérative à travers son conseil d'administration composé de 13 administrateurs, il veille aux orientations stratégiques de l'enseigne.

D'ailleurs, il répète à l'envi vouloir défendre La bio, un vrai projet de société, au-delà du bio, qui n'est que le cahier des charges. « Je fais du commerce pour changer le monde. Au-delà de vendre un produit avec un cahier des charges agronomique, on propose des produits locaux, équitables, qui garantissent aussi une bonne rémunération », déclare Pierrick De Ronne. Il refuse en bloc les a priori sur la fréquentation de ses magasins par des "Bobo CSP+". « Mes clients, ce sont des lecteurs de Télérama et des auditeurs de France Inter. Je veux dire par là qu'ils ont un sens politique de l'achat », remarque Pierrick de Ronne.

"On enterre un peu trop vite le bio, qui représente 6 % de la consommation en France."

Idéaliste militant

D'ailleurs, le président reconnaît proposer à travers son offre produits un « catalogue politique » . Ainsi, Biocoop ne vend plus de produits hors saison, de bouteilles d'eau en plastique ou de produits ultra-transformés tout en travaillant sur les emballages... « Nous nous plaçons dans une logique de prix justes, et non "bas" , pour faire accepter au consommateur de payer parfois un peu plus cher pour une vraie valeur ajoutée », explique le président de la coopérative. Le projet de Biocoop, c'est d'accompagner les consommateurs à faire des choix, à arbitrer plus facilement. Une stratégie payante puisque la fréquentation des magasins est en hausse de 2 % depuis septembre, malgré la crise. Pour aller plus loin dans son engagement, Pierrick De Ronne travaille sur l'impact de la marque sur la réduction des gaz à effet de serre, sur les produits, mais aussi sur le rôle des magasins et notamment le déplacement en voiture des consommateurs pour venir faire leurs courses. E-commerce, maillage plus dense, autant de pistes de réflexion pour rester cohérent sur les engagements de l'enseigne.

Citoyen responsable

Quel citoyen se cache derrière ce chef d'entreprise militant ? « Je ne suis pas très attaché aux choses... Je ne suis pas végétarien et oui, je peux faire mieux sur ma consommation de viande. J'arbitre sur les transports, je fais attention, mais on fait reposer toute la transition écologique sur les individus et cela m'exaspère. C'est quand même le rôle du politique de planifier... Légiférons sur l'élevage intensif avant de demander aux Français de moins manger de viande ! Je ne sens pas ces efforts pourtant nécessaires du côté des politiques... » , s'indigne Pierrick De Ronne. Il dénonce également l'opacité autour des différents labels qui ne répondent pas à des critères équitables et demande un encadrement législatif plus strict. « Le label Haute Valeur Environnementale (HVE) est une escroquerie. Ce n'est pas un indicateur de qualité écologique. Or, les gens pensent que c'est mieux que le bio, car personne ne sait ce qui se cache derrière ce sigle en définitive » , s'offusque le patron de Biocoop.

Le choix du Made in France

Dans son fief ardéchois, il accompagne ses filles (dont deux adolescentes) dans leur transition écologique. Celui qui privilégie un « engagement accueillant et sans jugement » n'interdit ni McDo ni Levi's à ses enfants et reste convaincu qu'elles opteront sans tarder pour des séances shopping en friperie ou dans des magasins de marques 100 % françaises. À l'instar de 1083, marque de jeans bio qui se relocalise à Marseille, fondée par Thomas Huriez, dont il salue la persévérance. « J'ai une passion et un grand respect pour les défricheurs qui font vivre leur projet contre vents et marées » , conclut Pierrick De Ronne. Serait-il lui aussi un entrepreneur à suivre ? « En tout cas, il porte une vision , témoigne Sylvain Ferry. Il incarne la force tranquille. À la fois déterminé et doué d'une habileté politique, il porte un discours qui tranche sans être donneur de leçons. »



Son parcours :

- 2003 : Gestionnaire de l'hôpital
de Pouma au Cameroun

- 2005 : Sciences Po Toulouse

- 2009 : Scop Bionacelle - Biocoop
à Annonay (en Ardèche)

- 2014 : Paris Dauphine - Business Management - dirigeants de SCOP

- 2018 : vice-président de Biocoop

- 2019 : président de Biocoop


 
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