[Tribune] Covid 19 - Les premiers résistants du retail sont sur le front
Pour résister face à la fermeture des magasins physiques, certaines enseignes mettent en place des logiques de ship from store ingénieuses, à l'instar d'Orchestra et Truffaut.
Je m'abonneLe président de la République a remercié les acteurs français qui sont en "deuxième ligne pour permettre au pays de continuer de vivre" pendant cette guerre contre le coronavirus, en citant les commerçants de proximité, les livreurs, les caissières, les agents de nettoyage, entre autres acteurs indispensables du quotidien. Dans cette catégorie et alors que tous les magasins physiques -hors produits de première nécessité- sont fermés jusqu'à nouvel ordre, faisant sombrer tout le secteur du retail, repérons les toutes premières enseignes à résister et se mobiliser en vue de la reprise.
Le retail est sous le choc, les opérations marketing et commerciales sont mises en suspens, du moins pour les marques non alimentaires, et la tendance actuelle est à l'arrêt total jusqu'à des jours meilleurs. Certaines enseignes, qui font encore figure d'exception, donnent aujourd'hui beaucoup d'espoir en formant les premiers bataillons de résistance face à cette crise inédite. Adressant les besoins très spécifiques, respectivement des jeunes enfants et des animaux domestiques, les enseignes Orchestra et Truffaut ne sont pas loin de devenir des cas d'école en termes d'adaptation et d'agilité omnicanale.
Repenser l'utilisation des boutiques durant cette "guerre"
Certaines, pour prendre ces exemples pour les produits de puériculture et d'alimentation animale, redéfinissent leur activité pour satisfaire des besoins de première nécessité, grâce à une gestion unifiée de leurs stocks et une logistique souple. Car les outils existent dans le retail, comme le ship from store. Et c'est le moment idéal d'en user, tout en respectant les mesures de protection imposées bien sûr, pour pouvoir répondre positivement à un maximum de clients tout en écoulant tous les stocks du réseau et non plus uniquement le stock réservé aux achats e-commerce, généralement fondé dans un seul et unique entrepôt central. En ces temps de crise, il est encore plus important d'orchestrer plus rapidement et intelligemment les commandes.
Il s'agit pour cela d'abord de choisir les bons magasins, d'abord ceux en capacité d'expédier et disposant de plus de stock, ou de gammes plus variées: Truffaut utilise ses plus grands magasins pour compléter son entrepôt central et Orchestra a sélectionné 30 de ses boutiques sur le territoire. L'expérience s'avère probante en ce début de crise, puisque c'est plus d'une commande en ligne sur deux qui a été expédiée depuis les boutiques. L'impact sur le chiffre d'affaires peut devenir très significatif et ce, en réquisitionnant une quantité moindre du personnel qui est ainsi dédié uniquement à la préparation des commandes (pour des raisons sanitaires). Une façon aussi d'éviter le recours systématique au chômage partiel pour les vendeurs.
Ensuite, il est essentiel pour les retailers d'adapter leur offre et leur service en fonction du contexte et des autorisations gouvernementales, de pouvoir rapidement choisir quelles catégories de produits proposer. Truffaut s'est donc recentré sur l'indispensable, l'alimentation animale uniquement, alors qu'Orchestra propose une livraison uniquement à domicile dès 20 euros d'achat. Enfin, les deux enseignes ont dû s'appuyer sur les transporteurs, en l'occurrence Colissimo, Geodis et GLS, également sur cette seconde ligne qu'évoquait le président.
Et après la guerre? La libération?
Et puisqu'on parle de solutions d'optimisation de ressources matérielles et humaines pour les marques, pourquoi ne pas anticiper pas le rebond post crise dès maintenant? Les détaillants vont tous avoir des stocks énormes sur les bras. Dans le textile, les collections actuelles finiront invendues et il y a fort à parier pour que la fréquentation des magasins reste longtemps atone à la suite de ces longues semaines d'inactivité et de peur. Pourtant, la reprise arrivera, la consommation rebondira forcément, c'est le cas actuellement en Chine, et il est probable que la reprise de la demande se fera tout d'abord sur le canal e-commerce. D'où l'intérêt de se préparer aujourd'hui avec des solutions omnicanales performantes pour répondre à la future demande et aux nouvelles habitudes d'achats, et ne surtout pas perdre davantage de distance.
Le choix des armes s'avère important dans ce combat. Des outils agiles et efficaces d'orchestration de commandes s'appuyant sur le ship from store prendront tout leur sens, et la maturité omnicanale des enseignes fera la différence pour diminuer l'impact de cette guerre sur le futur des (e-)marchands. L'objectif est ambitieux: permettre au pays de continuer de vivre ou plutôt de revivre.
Romulus Grigoras est CEO et cofondateur de OneStock. Il s'est lancé dans le commerce connecté après dix ans de recherche et d'enseignement en informatique et intelligence artificielle à l'INP de Toulouse.