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"On assiste à la grande revanche du magasin", Nathalie Cachet

Publié par le - mis à jour à
'On assiste à la grande revanche du magasin', Nathalie Cachet

Accélération des services, engagement des marques, discours de vérité, formats innovants, le retail pétille de nouveautés. Nathalie Cachet, directrice de Score DDB, revient sur la dynamique du secteur et ses évolutions récentes.

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Que retenez-vous de cette année 2020 si particulière en tant qu'observatrice attentive du marché?

La période que nous venons de vivre a poussé tous les acteurs à bouger et à revoir toutes leurs organisations, plus vite que prévu. Cela a fait du bien au commerce et en particulier au e-commerce. Et même si les consommateurs ont changé certaines de leurs habitudes, on assiste à la grande revanche des magasins qui restent le lieu du plaisir d'achat. Certains de nos clients faisaient, avant l'été, le même chiffre d'affaires qu'en période de Noël. On constate par ailleurs que les marques ayant le mieux vécu la crise sont celles qui ont su placer l'humain au coeur de leur fonctionnement. On assiste à un phénomène intéressant puisqu'après avoir observé une digitalisation massive des points de vente physiques, on voit maintenant les retailers replacer l'humain au coeur de leur relation digitale. Comme un effet miroir. Le live shopping en est un bon exemple. Tout comme les ambassadeurs de marques, ou encore les influenceurs qui prennent le pouvoir.

Que pensez-vous du phénomène de retailtainment? À quoi ressembleront les centres commerciaux nouvelle génération? Est-ce vraiment ce à quoi aspirent les consommateurs?

C'est un vrai sujet. Ils vont devoir se réinventer totalement pour à la fois faire venir les consommateurs et réussir à les divertir. Proposer des bons produits à des bons prix ne suffit plus. Les centres commerciaux doivent surprendre, étonner, donner des occasions de venir et de revenir. Et d'ailleurs, il se passe des choses... On les voit se transformer en espaces de divertissement avec des sessions de cinéma en plein air, des défilés de mode, des concerts... dans le but de satisfaire le plus grand nombre. Il n'y a plus de frontières. Kiabi arrive chez Auchan, Décathlon et Hema chez Franprix, Monoprix Plus et son offre élargie, ING banque devient un café, des espaces de coworking se multiplient... Tout cela a été accéléré avec la crise sanitaire.

Un mot sur la réouverture de la Samaritaine qui allie luxe, design, architecture?

C'est l'image du luxe à la française. C'est magnifique d'avoir redonné vie à la Samaritaine qui incarne l'esprit "grands magasins". Cela fait partie du patrimoine français et c'est, là aussi, la grande revanche du magasin.

Quelles tendances décelez-vous en matière de théâtralisation et d'animation des points de vente?

On l'a évoqué, le retailtainment est au coeur de l'animation et de la vie dans les magasins. Mais je pense qu'à terme, beaucoup de points de vente vont devenir des showrooms de marques où l'on ne pourra pas acheter sur place (seulement en ligne ou sur mobile). Comme la boutique de Samsung sur les Champs-Élysées, par exemple. Je constate également qu'il y a de moins en moins de caisses et de plus en plus de place pour l'événement, comme à l'Apple Store. Place à l'expérience et à la mise en scène des produits, les vendeurs ambulants se chargent des transactions. Enfin, je pense que le magasin traditionnel ne va plus exister en tant que tel. Les banques deviennent des espaces de coworking, les magasins d'alimentation se transforment en espaces de restauration, au BHV on peut se faire faire une manucure... Toutes les DNVB, comme Le Slip français ou Cézanne, ouvrent des boutiques en proposant de nouvelles expériences qui attirent les jeunes. Il n'y a plus de règles ! Les marques doivent être malines et partir des envies des consommateurs pour enrichir et adapter leur offre au service des gens.

Quelles sont les attentes des consommateurs?

Le bien-être est largement plébiscité par les clients, y compris dans les centres commerciaux, avec la création de salles de sport, de salons de massage... On voit aussi de nouveaux produits apparaître dans les rayons, Monoprix qui va vendre des produits à base de CBD (Cannabidiol) grâce à un truck. La tendance est aux produits solides, à la réduction d'emballages... Mais ces évolutions impliquent des changements dans la manière dont sont structurés les points de vente, le vrac n'est pas géré ou présenté de la même manière en boutique. En amont, l'organisation est fortement impactée. Yves Rocher, par exemple, travaille sur l'évolution de son packaging, mais cela implique une réorganisation profonde des chaînes de production. En parallèle, le besoin d'aller vers les autres et d'être solidaires tout en prenant conscience de la planète a été le grand révélateur de cette crise.

Croyez-vous à la pertinence des modèles de distribution en périphérie des centres-villes?

Je pense que les modèles figés avec des baux 3-6-9 ont vécu. Il y a beaucoup de centres commerciaux qui se vident, il faut un système de location plus souple. Les consommateurs réclament de l'éphémère avec de nouvelles expériences à vivre, à découvrir et l'arrivée d'acteurs plus innovants. Aussi, je pense que le secteur va devoir bouger rapidement. Ces dernières années, on a vu les distributeurs investir les grandes villes avec des formats adaptés au schéma urbain (Auchan, Leclerc Drive, Carrefour...). Inimaginable il y a quelques années, on a vu débarquer Ikea et Leroy Merlin dans Paris avec des offres plus adaptées aux besoins des consommateurs ! C'est un signe fort de changement du modèle de distribution. Les commerces vont devenir des centres de services.

Quelles sont les demandes des enseignes que vous accompagnez chez Score DDB?

Nous travaillons avec elles sur la transparence et leur engagement RSE. Raconter les origines des produits, la qualité, les bienfaits nutritionnels, les circuits courts, justifier les prix... Que ce soit pour Kiabi, Picard, Yves Rocher ou encore Norauto, nous privilégions la proximité. Mais aussi le sens du collectif en mettant en scène les collaborateurs. Et puis, et c'est la signature de l'agence, nous communiquons sur le plaisir et l'émotion avant tout. On s'amuse avec les clients, car la complicité est importante. Pour cela, il faut réduire la distance entre la marque et le client et renouer avec les liens originels du commerce. Pour Picard, nous venons de signer la nouvelle campagne de marque, "Bienvenue", une formule qui est un basique pour les commerçants. L'inclusivité est aussi un sujet phare pour les retailers.

Quelles sont les tendances en matière d'expression publicitaire des retailers?

Ce qui ressort, c'est la sincérité et la complicité avec le consommateur. Les marques cherchent à se rapprocher des gens. Pour les émouvoir, il faut leur permettre de se reconnaître dans la marque - Intermarché est un bel exemple de réussite. De leur côté, les annonceurs osent davantage. Le secteur pétille de nouveautés.

Quelle est, selon vous, la marque qui bouscule un peu les codes?

Kiabi est, selon moi, le champion toutes catégories. C'est une grosse enseigne avec 500 points de vente et un site e-commerce performant qui innove en permanence. Avec à sa tête une nouvelle direction, elle s'engage fortement dans une démarche RSE. Cette enseigne très populaire a un réel impact sur la société : toutes les lignes bébé sont en coton bio, Kiabi est une marque inclusive sur les tailles, les handicaps. Ses campagnes de pub mettent en avant des gens en fauteuils ou des enfants trisomiques. La marque fait aussi évoluer ses collaborateurs, grâce à un programme dédié. Elle a lancé la location de vêtements de ski, de cérémonie, de maternité, mais également un site de vente de vêtements de seconde main. Adepte des "shop in shop", Kiabi vient de signer un partenariat avec Auchan. L'entreprise invite aussi des marques, comme Damart. La marque a réussi à nouer un lien de confiance avec le client.

Qu'est-ce qui vous inspire au quotidien?

Je fais beaucoup de moto et de bateau. Ce que j'aime, c'est l'esprit de camaraderie et la force du collectif. Beaucoup d'idées me viennent pour mes clients à travers ce sentiment de liberté.

Quel pays vous semble intéressant à observer?

La Chine étonne par sa démesure. C'est un laboratoire avec beaucoup de formats à tester en France mais sa dynamique est de plus en plus forte. Les Chinois ont soif de consommer, ils expérimentent. Nous observons ce marché avec attention.

Vous travaillez depuis 20 ans pour des acteurs du retail. Qu'est-ce qui vous plaît tant dans ce secteur?

Le retail permet de travailler avec les comités de direction, les services achat, les directeurs marketing, les directeurs de la communication, les chefs de produits... Cela permet d'avoir une influence et de faire avancer l'entreprise dans sa globalité en activant tous les points de contact. Le magasin, le prospectus, l'animation des équipes de vente via des plateformes de communication interne... On peut s'amuser avec la communication commerciale ou le programme de fidélité de l'enseigne... Bien au-delà de signer un film de marque.

Son parcours

1990: Entre chez Piment, rachetée par DDB

1995-2009: Piment DDB

2010: Crée Score DDB, la première agence 100% dédiée aux marques à réseaux, à Paris et à Roubaix


 
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