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"S'appuyer sur des actifs communautaires pour créer des marques e-commerce", Agnès Alazard

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'S'appuyer sur des actifs communautaires pour créer des marques e-commerce', Agnès Alazard

Agnès Alazard est directrice générale du groupe Aufeminin depuis 2016. Au moment où une nouvelle page s'ouvre après le rachat par TF1, elle détaille la stratégie d'un groupe média créateur de communautés, qui a transformé son modèle et a fait du e-commerce l'un des trois piliers de son activité.

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Le Groupe aufeminin a été racheté, fin avril, par le Groupe TF1. En quoi cette opération est-elle significative de l'évolution des marques médias?

Aufeminin a su anticiper les évolutions du marché du digital et asseoir son activité sur trois piliers stratégiques -les contenus, le programmatique et l'e-commerce

Le rachat illustre d'abord la volonté d'un groupe leader de se diversifier. Les acquisitions de MinuteBuzz et Studio71 avaient déjà marqué le souhait du groupe TF1 d'aller vers de nouveaux métiers médias. Aufeminin est à ce jour l'acquisition la plus significative de leur pôle digital. Cela montre aussi que la transformation de l'intérieur passe par des collaborations rapprochées avec des modèles qui ont déjà réussi leur évolution. Aufeminin a su anticiper les évolutions du marché du digital et asseoir son activité sur trois piliers stratégiques -les contenus, le programmatique et l'e-commerce-, qui pèsent aujourd'hui chacun pour un tiers du chiffre d'affaires. C'est peut-être aussi notre capacité à faire croître de nouveaux segments qui a incité le groupe TF1 à s'associer à Aufeminin. Nous faisons 50% de notre chiffre d'affaires à l'international. L'international n'était pas dans l'ADN du groupe TF1, mais la création d'une régie publicitaire paneuropéenne EBX, avec ProSiebenSat.1 Mediaset et Channel4, montre aussi leur volonté d'aller vers un rayonnement plus large.

Quel type de perspectives cela ouvre-t-il pour aufeminin?

Cela va permettre à nos propositions et à nos produits de bénéficier de la puissance de frappe de TF1 auprès de l'ensemble des foyers, sous des formes qui restent encore à définir. Avec les annonceurs, il sera aussi possible d'imaginer des dispositifs puissants, pertinents et intégrés, qui s'appuieront sur la puissance de la télévision et la créativité du digital pour maximiser la couverture et l'efficacité des campagnes. Il y aura des synergies à imaginer avec les chaînes et les autres actifs digitaux du groupe.

Est-ce que cela va changer votre organisation?

Le groupe TF1 devenant l'actionnaire de référence, la nomination d'Olivier Abecassis ­ [ex-­directeur Innovation et Digital du groupe TF1, NDLR] au poste de p-dg d'Aufeminin va permettre de trouver des ponts entre les actifs de nos deux groupes. De manière tactique, nous essayerons d'accélérer les collaborations qui semblent pertinentes. La capacité de production vidéo du groupe TF1 est beaucoup plus importante que la nôtre. Ensemble, nous serons plus forts dans nos relations avec les plateformes... Sur notre organisation interne, cela ne changera rien. Nous continuerons à être organisés de manière très structurée et très agile, pour réajuster nos propositions en permanence et embarquer l'ensemble à l'international.

Marie-Laure Sauty de Chalon a quitté Aufeminin à l'occasion du retrait d'Axel Springer, jusqu'alors actionnaire de référence. Qu'a-t-elle apporté de plus significatif pendant ses huit ans à la tête du groupe?

Nous sommes très fiers de ce qui a été construit avec Marie-Laure. Elle a eu une grande ambition pour Aufeminin et a réussi à incarner la mission du groupe autour du woman empowerment. Elle a installé dans les équipes le besoin de se remettre en question, d'être toujours en position de conquête et d'exploration des business models de demain, même quand les positions de marché sont difficiles. Sous son impulsion, le groupe a construit un modèle qui donne confiance en l'avenir car il est diversifié et assis sur trois métiers différents. Aufeminin a eu différentes histoires depuis sa création en 1999 et aurait déjà pu mourir dix fois, mais cette entreprise a toujours eu le courage de se réinventer. Les équipes tirent une vraie motivation dans cette capacité à se reconstruire.

Comment évoluent vos ambitions dans l'e-commerce?

On avait été très impressionnés par la réussite de MyLittleParis, qui s'était appuyé sur une communauté fidèle pour imaginer les produits qui la feraient rêver. Les box ne correspondent pas à un achat rationnel, mais à un achat plaisir, qui provoque une surprise et renvoie une image de soi. Aux côtés de MyLittleParis, Aufeminin a appris l'e-commerce, puis lancé ses propres initiatives à partir de 2015 avec Beautiful Box by Aufeminin. Nos box fonctionnent bien car elles sont assises sur une croissance organique et pas sur un business d'acquisition. Nous avons une excellente rentabilité sur ces produits dès la première année. L'offre s'est progressivement diversifiée. On peut d'ailleurs aller très loin dans la segmentation à partir du moment où l'on arrive à proposer un ­storytelling qui donne envie de poursuivre la conversation et d'acheter les produits. C'est ce que nous faisons avec les box Gretel sur l'alimentation "healthy". Au-delà des box, nous investissons aussi dans des portails e-commerce sur le maquillage ou sur les bijoux, par exemple avec la marque Madeline, lancée en mai. Aufeminin vient également d'éditer, avec Coorpacademy, un Mooc sur le social e-commerce pour partager ces bonnes pratiques et l'expérience acquise dans ce domaine.

Parcours
-Agnès Alazard est diplômée de SciencesPo Paris et titulaire d'un master de la London School of Economics and Political Science.
2000. Elle occupe différentes fonctions avant d'être nommée directrice de publicité internationale groupe Le Figaro / Groupe Express.
2007. Elle rejoint le groupe Aufeminin en tant que directrice de la publicité internationale de la régie.
2009. Elle est nommée directrice commerciale France et international.
2010. Elle est promue directrice générale de la régie du groupe Aufeminin.
2016. Agnès Alazard devient directrice générale du groupe Aufeminin.


Qu'est-ce qui explique cette réussite alors que beaucoup de marques médias ont accusé des revers dans leurs développements e-commerce?

Nous sommes très différents de ces marques médias qui avaient tenté de se diversifier dans l'e-commerce. Nous représentons d'abord des communautés, qui nous donnent une mission et un pouvoir de marque. La marque doit tout à sa communauté et pas l'inverse. Nos marques médias s'appuient sur leurs actifs communautaires pour créer d'autres marques qui, elles, sont des marques e-commerce. Beautiful Box by Aufeminin n'est pas Aufeminin, et Gretel n'est pas Marmiton, mais ces marques se nourrissent de l'ensemble des insights médias, éditoriaux et communautaires du groupe.

Quelle est la dynamique de croissance d'une marque comme Marmiton?

Marmiton est une réussite exceptionnelle, avec 15 millions de visites par mois sur sa plateforme web, sur son application mobile et les plateformes sociales. En étudiant les comportements des internautes, on voit bien qu'on ne cuisine que quand on est heureux! Cette marque apporte une proposition de valeur très concrète en rendant accessible toutes les formes de cuisine. Elle donne confiance car chaque recette a été testée par des centaines de gens, qui ont apporté un petit commentaire. La stratégie de verticalisation de l'offre et des communautés répond à l'état d'esprit du moment des internautes, qui peuvent avoir plutôt envie d'une cuisine détox ou de recettes gourmandes... Cela doit nous permettre de conquérir de nouvelles générations et de garder un engagement énorme avec la marque, qui est la marque cuisine digitale préférée depuis dix ans. Nous voulons aussi rester très en amont des nouvelles tendances alimentaires et poursuivre notre mission en faveur du bien-manger et de l'équilibre alimentaire. Nous essayons aussi d'amener nos marques partenaires à investir ce territoire que les consommateurs attendent.

Parmi les formats éditoriaux, quels sont les plus porteurs d'avenir?

Nos marques sont des prétextes à la conversation. Aujourd'hui, les formats qui fonctionnent sont ceux qui créent de l'émotion, que ce soit par la vidéo, la photo, l'infographie... En juin, Aufeminin et Marmiton lancent de nouveaux formats de podcasts. Avec ces deux marques, nous travaillons aussi sur des formats vocaux, qui ont un potentiel énorme en mobilité. Marmiton sera le partenaire cuisine d'Alexa sur Amazon. Sur les réseaux sociaux, les formats et les contenus qui fonctionnent bien sont ceux qui sont le prétexte à la bonne conversation avec les vrais amis. Les femmes sont très réactives aux sujets qui permettent de libérer la parole et de s'affranchir des tabous. Les nouvelles générations constituent des communautés sensibles à de nouveaux ressorts d'achat, qui changent tout le temps. Pour les suivre, cela impose d'être dans une agilité permanente et d'évoluer au fil de l'eau, comme une conversation normale.

Quels objectifs guident votre politique d'acquisition?

Les acquisitions ont d'abord permis de consolider et de transformer les métiers traditionnels du groupe Aufeminin tel qu'il était il y a dix ans, c'est-à-dire un groupe média communautaire basé sur la publicité display. Nous avons assis nos positions en Europe grâce au rachat du site de santé Onmeda en Allemagne, de Netmums au Royaume-Uni... Ensuite, nous sommes passés à l'acquisition de métiers, avec MyLittleParis dans l'e-commerce ou Livingly Media aux États-Unis, qui permet d'avoir une monétisation des audiences 100% programmatique et extrêmement rentable. Leur expertise inspire toute notre stratégie programmatique en Europe. Nous venons de procéder à l'acquisition d'Ykone, car nous sommes convaincus que le marketing d'influence n'est pas une tendance mais un segment de marché sur lequel nous voulons nous positionner.

Comment monétisez-vous les audiences?

Notre premier savoir-faire consiste à créer des audiences et à monétiser de l'espace média. Dans notre approche publicitaire, nous avons toujours considéré que la vente directe ou le programmatique était un seul et même produit. Quel que soit le mode de commercialisation, nous nous efforçons d'avoir la meilleure proposition de valeur. Ces audiences commercialisées en display viennent sur nos marques parce que nous avons réussi à capter leur attention grâce à un bon référencement Google ou aux réseaux sociaux. L'objectif consiste ensuite à créer de la relation pour amener l'audience à interagir, à commenter des recettes ou à s'inscrire à des tests de produits.

Ce savoir-faire en matière d'engagement nous permet de travailler avec les annonceurs à travers du brand content, des événements que l'on organise, des partenariats avec les influenceurs... Quand on a réussi à créer de la relation, on peut passer à la troisième étape, c'est-à-dire à l'achat à travers l'e-commerce.

Quelle est la place de l'international dans votre activité?

Elle est centrale! Depuis nos débuts, l'ensemble des projets sont embarqués à l'international et la stratégie globale du groupe est définie avec l'ensemble des pays. L'international apporte une énorme richesse car on est en permanence surpris de ce qu'on en apprend. En Allemagne, nous avons un jour réalisé que 40% de notre audience venaient de Pinterest et que nous n'étions plus dépendants de Google. Le savoir-faire sur Pinterest développé en Allemagne a ensuite profité à d'autres pays. Sur tout ce qui est restaurants, hôtels, cuisine, maquillage ou robes de mariée, c'est l'image qui donne envie. Dans nos univers, la performance des requêtes par images est très puissante. L'Italie réussit très bien sa stratégie vidéo et a été une source d'inspiration pour le Royaume-Uni, qui avait peu d'historique dans ce domaine. Tous les pays sont des laboratoires de bonnes idées. La veille permanente dans chacun des 21 pays où le groupe est présent permet de trouver les bonnes idées et de mieux comprendre le fonctionnement des marchés.

Les dates-clés d'aufeminin
1999. Création du site Aufeminin.com par Anne-Sophie Pastel, Marc-Antoine Dubanton et Cyril Vermeulen.
2000. Entrée en Bourse.
2006. Acquisition de Marmiton.
2007. Désengagement des fondateurs et entrée au capital du groupe allemand Axel Springer.
2013. Acquisition de MyLittleParis.
2018. Rachat par le Groupe TF1.

 
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