Recherche

Conditions de travail chez Shein à nouveau pointées du doigt par un rapport accablant

Publié le mercredi 30 juillet, le rapport d'ActionAid France, en partenariat avec l'ONG China Labor Watch, lève le voile sur les violations systématiques des droits humains dans les ateliers chinois sous-traitants de Shein. Cadences inhumaines, salaires dérisoires, violences sexistes : l'envers d'un modèle ultra-rentable.

Publié par Elsa Guerin le | mis à jour à
Lecture
3 min
  • Imprimer
Conditions de travail chez Shein à nouveau pointées du doigt par un rapport accablant
Getting your Trinity Audio player ready...

Avec un chiffre d'affaires estimé à 38 milliards de dollars en 2024, selon le Financial Times, Shein s'impose comme l'un des poids lourds mondiaux de la mode. En France, la marque est même devenue, en 2024, l'enseigne préférée des Français pour l'achat de vêtements. Mais à quel prix ?

Ce mercredi 30 juillet, l'association ActionAid France publie l'enquête "Mode jetable, exploitation durable : l'exemple Shein", menée en collaboration avec l'ONG américaine China Labor Watch. Durant près de trois ans, des enquêteurs ont infiltré une vingtaine d'ateliers partenaires de la marque dans le sud de la Chine, à Guangzhou, notamment dans le quartier industriel de Kangle. Ils ont recueilli plus d'une cinquantaine de témoignages de travailleuses et travailleurs.

Une exploitation systémique

Le constat est sans appel : exploitation systémique, absence de protection sociale, horaires à rallonge, et salaires à la pièce dérisoires, allant de 0,06 à 0,27 euro par vêtement produit. L'enquête dénonce une précarité organisée, dans un système où les ateliers informels sont volontairement dispersés pour échapper aux contrôles et garantir une flexibilité maximale à Shein.

"Ces travailleurs sont piégés dans un cycle de misère : leur production alimente un modèle économique extrêmement rentable, sans leur garantir les droits fondamentaux", alerte Salma Lamqaddam, chargée de campagnes chez ActionAid France.

Autre révélation glaçante : les femmes, majoritaires dans ces ateliers, sont doublement victimes. Moins bien rémunérées, cantonnées aux tâches les plus instables, certaines sont contraintes d'emmener leurs enfants dans les ateliers. L'enquête fait état de violences sexistes, notamment verbales, exercées dans un climat de peur et de dépendance économique.

Des alertes répétées

Dès 2023, de nombreux rapports ont déjà pointé du doigt les conditions de travail dans l'empire chinois : horaires excessifs, rémunérations dérisoires, et même recours au travail des mineurs. En 2024, Shein affirme avoir multiplié les audits auprès de ses fournisseurs et reconnaît deux cas de travail d'enfants au cours de l'année écoulée, soit autant qu'en 2023.

Mais ce nouveau rapport met surtout en lumière les mécanismes structurels d'un modèle fondé sur une production délocalisée, ultra-flexible, reposant sur une multitude de micro-ateliers, permettant à l'enseigne de se déresponsabiliser face aux abus.« Ce n'est pas une anomalie, mais l'enfant d'un système insoutenable. »conclut ainsi l'enquête.

ActionAid regrette que le respect des droits humains ne figure pas dans la loi anti-fast fashion adoptée en juin dernier en France. Le texte, validé par l'Assemblée nationale et le Sénat, doit encore passer en commission mixte paritaire à la rentrée. De son côté, Shein réfute les accusations, qu'elle qualifie d'infondées.

Livres Blancs

Voir tous les livres blancs
S'abonner
au magazine
Se connecter
Retour haut de page