Comment Deezer orchestre sa croissance
Avec 30 millions d'utilisateurs dans le monde et un chiffre d'affaires de 60 millions d'euros, Deezer s'est imposé, en moins de six ans, comme l'un des leaders du marché de la musique en ligne. Simon Baldeyrou, son directeur général France, livre les secrets de croissance du nouveau disquaire 2.0.
Je m'abonneEn seulement cinq ans d’activité, Deezer a enregistré un taux de croissance de 10 455 %, ce qui vous a valu notamment la seconde place du Deloitte Technology Fast 50 en novembre 2012. Quel est votre secret ?
Simon Baldeyrou, Directeur général France de Deezer : C'est un très beau signe, même si le taux en lui même est difficile à appréhender. Tout dépend d’où on part. En l’occurrence, ce qui me semble important de retenir au sujet de Deezer c’est que nous comptabilisons 30 millions d’utilisateurs et 3 millions d’abonnés dans le monde, pour un chiffre d’affaires de 60 millions d’euros en France en 2012 [contre 47,4 M€ en 2011].
Ensuite, la clé de la croissance de Deezer repose d’abord, selon moi, sur une succession de bonnes associations, aussi bien au sein de l’équipe dirigeante, qui réunit des personnalités et des compétences complémentaires, qu’avec nos investisseurs. Ce terreau fertile nous a permis d’innover perpétuellement et de nous développer rapidement.
L’autre force de Deezer a été de créer dès le départ une image de marque pionnière forte dotée d’un bon capital sympathie basé sur un bouche-à-oreille inattendu.
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Enfin, nous avons réussi à comprendre les intérêts et les préoccupations des acteurs avec qui nous travaillons. Je pense en particulier aux maisons de disques, avec lesquelles nous avons toujours cherché à trouver un terrain d’entente entre nos ambitions et les leurs. Ce qui n’a, il est vrai, pas toujours été simple. Les trois premières années nous leur avons reversé 150 % de nos revenus. Aujourd’hui, nous y consacrons encore les deux tiers. Pour autant, il est tout a fait normal de payer pour des contenus que nous ne produisons pas.
Fiche repèresActivité Ville Forme juridique Dirigeants Année de création CA 2011 CA 2012 Effectif 2013 |
Un rythme de développement qui a supposé de lourds investissements. Comment avez-vous géré cette hyper croissance ?
S. B. : Les différents tours de table nous ont en effet permis d'investir 14 millions d’euros sur quatre ans pour arriver à l’équilibre tout en nous développant rapidement. Notre souci majeur est que nous avons toujours eu besoin de beaucoup de capitaux pour innover. Ce qui a aussi supposé une perpétuelle remise en question. À commencer par notre modèle économique qui a constamment évolué. Au départ gratuit, nous proposons désormais un service d’abonnement à 9,99 euros par mois donnant accès en illimité à 20 millions de titres quel que soit le support.
S. B. : Si la majorité de notre activité provient encore du marché français, nous concentrons actuellement nos efforts sur l’internationalisation de notre modèle. Nous sommes aujourd’hui présents partout dans le monde [plus de 180 pays] excepté aux États-Unis, en Chine, au Japon et en Inde. En six mois nous avons ainsi ouvert une vingtaine de bureaux à l’étranger (Berlin, Barcelone, Istanbul, Toronto, Rome…) qui déploient à chaque fois un éditorial et des tarifs adaptés. Si bien que Deezer embauche aujourd’hui 150 salariés en France et plus d’une soixantaine de collaborateurs à travers le monde.
Ces rapides développements sont possibles grâce à notre large réseau de partenaires à l’échelle internationale, en particulier avec les opérateurs télécoms qui incluent automatiquement Deezer dans certaines de leurs offres. Outre Orange, nous avons conclu des accords avec une vingtaine d’acteurs du secteur au total. Ce relais représente pour nous à la fois un chiffre d’affaires garanti, mais aussi une communication gratuite auprès de futurs clients : leurs forces de vente s’improvisant ambassadeurs de Deezer sur le terrain.
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Sur un marché de la musique en ligne de plus en plus compétitif, qui voit chaque jour arriver de nouveaux acteurs, comment comptez-vous faire la différence ?
S. B. : Même si les habitudes de consommation de la musique sur Internet ont réellement évolué ces dernières années et que les gens sont désormais prêts à payer pour écouter de la musique en ligne, il nous reste encore à faire preuve de pédagogie concernant les services liés à Deezer.
Nos abonnés ont certes accès en illimité à des millions de titres et ce, même sur leur mobile en mode hors connexion. Mais Deezer ne se limite pas à un pourvoyeur de musique. Notre ambition est de devenir le nouveau disquaire. Contrairement à d’autres, c’est notre unique cœur de métier et nous allons encore renforcer nos services liés à la découverte de coups de cœur musicaux et à la suggestion d’artistes, au partage de musique entre utilisateurs et à l’interaction entre artistes et fans.
C’est dans cette logique que nous offrons actuellement un accès gratuit et illimité à notre plateforme pendant 15 jours.
La levée de fonds de 100 millions d’euros que nous avons finalisé fin 2012 va également nous permettre d’accélérer d’une part le développement de ces nouvelles fonctionnalités, et d’autre part, de consolider nos investissements à l’international. C’est maintenant que tout se joue. À nous de prendre le bon virage dès aujourd’hui.