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Les Français préfèrent encore le neuf soldé au reconditionné

Malgré une prise de conscience environnementale croissante, les habitudes de consommation dans le secteur numérique restent largement tournées vers l'achat de produits neufs. C'est ce que révèle une étude du collectif "On passe la seconde" : seuls 29 % des Français déclarent privilégier le reconditionné pour leurs achats de matériel numérique, tandis que 53 % préfèrent encore le neuf soldé ou en promotion.

Publié par Jérôme Pouponnot le | mis à jour à
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Les Ateliers du Bocage
Les Ateliers du Bocage
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Le marché de la seconde main peine à séduire dans la tech. Cette tendance interroge, particulièrement dans un contexte où le Sénat vient d'adopter une proposition de loi contre la fast fashion. Les Ateliers du Bocage, coopérative membre du mouvement Emmaüs spécialisée dans le reconditionnement depuis 25 ans, et le SIRRMIET (Syndicat Interprofessionnel du Reconditionnement et de la Régénération des Matériels Informatiques) tirent la sonnette d'alarme sur cette résistance du secteur numérique aux pratiques de consommation responsable.

L'impact environnemental et social méconnu

Derrière l'argument prix, souvent mis en avant par les consommateurs, se cachent des coûts sociaux et environnementaux importants. En 2023, 1,34 milliard de smartphones ont été vendus dans le monde (Source : Ventes de smartphones dans le monde 2023 - Statista). Selon l'ADEME, chaque téléphone fait quatre fois le tour du monde avant d'arriver entre les mains du consommateur final, et sa fabrication représente les trois quarts de ses impacts environnementaux.

Plus préoccupant encore, l'extraction des minerais nécessaires à la production de ces appareils, remplacés en moyenne tous les deux à trois ans (source Ademe "Garder son smartphone le plus longtemps possible"), fait appel au travail de 40 000 enfants dans les mines de cobalt et de coltan, selon l'Unicef. Ces réalités contrastent avec les attentes des consommateurs : près de 9 Français sur 10 estiment que les marques devraient être plus transparentes sur l'impact environnemental de leurs produits et encourager la seconde main.

Des initiatives locales porteuses d'espoir

Face à ces enjeux, des acteurs français développent des alternatives concrètes. Les Ateliers du Bocage illustrent cette dynamique vertueuse. En 2024, cette entreprise d'insertion a traité plus de 320 000 mobiles dans les Deux-Sèvres et réparé 11 800 téléphones. Leur modèle économique démontre qu'il est possible de concilier impact social et environnemental : 15 000 téléphones ou 1 000 ordinateurs traités permettent la création d'un emploi.

Cette approche répond aux convictions des Français, dont près de 7 sur 10 considèrent que le marché de la seconde main stimule l'économie locale et la création d'emplois. L'entreprise, qui emploie 200 personnes et réalise un chiffre d'affaires annuel de 15,5 millions d'euros, a accompagné 75 personnes en contrat d'insertion en 2024.

Les freins à lever pour démocratiser le reconditionné

Malgré ces initiatives prometteuses, plusieurs obstacles persistent. Le reconditionné souffre encore d'une image floue auprès du grand public, souvent confondu avec de l'occasion classique. Les consommateurs s'inquiètent de l'absence ou de la durée de garantie, du service après-vente et de l'état des articles.

Pourtant, les professionnels du secteur mettent en place des protocoles stricts. Aux Ateliers du Bocage, chaque appareil subit jusqu'à 74 points de contrôle, les données sont effacées via des outils certifiés, et les équipements bénéficient d'une garantie comparable à celle du neuf. Le taux de retour particulièrement bas témoigne de la fiabilité de ces produits remis en circulation.

Des mesures structurantes nécessaires

Pour accélérer cette transition, le SIRRMIET, qui fédère 40 entreprises françaises traitant plus de 10 millions de produits reconditionnés annuellement, plaide pour des mesures structurantes. Reynold Simonnet, vice-président du syndicat, pointe notamment la concurrence déloyale de produits importés vendus à bas coût, qui fragilise l'écosystème français du reconditionnement.

Le syndicat porte plusieurs priorités : lutte contre la fraude à la TVA, unification des labels de qualité, encadrement de l'écocontribution sur les produits importés, et soutien aux filières locales. Des actions essentielles pour créer les conditions d'un basculement du marché de la tech vers plus de durabilité et de responsabilité sociale.

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