[Interview] Joshua Xian (Suning): "L'intelligence artificielle a modifié tous les pans du commerce en Chine"
Joshua Xiang, vice-président du groupe de distribution Suning, viendra expliquer sa vision du "smart retail" à l'occasion de la journée China Connect, le 5 juillet, à Shanghai. Il revient sur la convergence entre commerce en ligne, mobile et off line pour E-CommerceMag.fr.
Je m'abonneQu'est-ce que l'intelligence artificielle a apporté à l'e-commerce chinois? Comment les nouvelles technologies permettent-elles de lutter contre les effets du ralentissement économique et le déclin du nombre de clients en magasin?
L'intelligence artificielle a modifié tous les pans du commerce en Chine. Sur le volet front end, les chatbots apportent des services à des millions de clients. En magasin, le traitement de l'image et la reconnaissance faciale permettent de tracker le parcours client en magasin et mettent en exergue les zones chaudes.
Concernant le back end, l'inventaire est mis à jour en permanence et les stocks sont ajustés en fonction de la demande. De même, dans les entrepôts et le système de distribution, la marchandise est affectée au bon endroit au bon moment. Tout cela grâce à des machines intelligentes et à l'analyse de la big data liée aux clients, aux produits et aux différents parcours.
Il y a quelques années, les nouvelles technologies en ligne rendaient l'e-commerce plus pratique moins économique pour les consommateurs, causant un déclin du nombre de clients en magasin. Maintenant, des technologies telles que les iBeacons suivent les clients, voient leurs centres d'intérêt et leur envoient des publicités ciblées. Les clients sont de nouveau attirés par les magasins physiques et se montrent plus satisfaits de leur expérience d'achat et des interactions avec les vendeurs.
- Pourriez-vous me donner quelques exemples de smart retail en Chine en 2016-2017?
L'un d'entre eux est la plateforme de commerce conversationnel développée par Suning. Cette solution d'intelligence artificielle utilise les chatbots pour conclure des transactions de bout en bout. En plus d'utiliser un site ou une application e-commerce, les clients peuvent effectuer des achats en tchattant avec un chatbot comme si ce dernier était une véritable personne.
Autre exemple: la solution "smart home" Suning Smart Living permet de contrôler tous les appareils de la maison via une application mobile. L'utilisateur peut également collecter toutes les données concernant ses habitudes, monitorer son environnement et régler tous les devices grâce à des programmes personnalisés. Ainsi, les marchands sont en mesure de lui offrir les produits et services au bon moment.
- Comment voyez-vous le développement de la technologie "paying with your face" en Chine? Cela pose-t-il des problèmes en termes de protection des données personnelles?
Il s'agit d'une tendance naissante, applicable à certains parcours, pour certains produits. Par exemple, pour la vente de petits articles (snacks) dans une supérette, le "grab and go", le fait de pouvoir repartir sans effectuer le geste de paiement, apparaît très intéressant. Cela ne convient pas pour les achats plus personnels.
- L'obsession de la data atteint-elle la Chine comme elle a touché l'Europe et les États-Unis?
Le marché mobile chinois est le plus important au monde. Le gouvernement et les entreprises collectent de formidables quantités de données. La somme et la variété de ces données sont encore plus importantes qu'en Europe ou aux États-Unis. On peut certainement parler d'obsession de la data, parfois excessive.
Les Chinois sont passionnés, par exemple, par les rumeurs et photos publiées dans les tabloïds au sujet des célébrités, y compris fausses. Récemment, le gouvernement a banni plusieurs comptes Weibo qui étaient en fait des tabloïds (un réseau social similaire à Facebook et Twitter réunis). Alors que l'information semble ne plus avoir de bornes, nous devrions prêter attention aux conséquences de cette obsession.
- Comment fonctionne la relation entre le commerce traditionnel en point de vente et le commerce en ligne et le commerce connecté en Chine?
De nombreux acteurs du brick and mortar ont beaucoup pâti de la poussée de la vente en ligne. Ils perçoivent cette dernière comme la plus grande menace qui les vise. Pourtant, ces marchands sont désireux de passer à la vente en ligne. Mais peu y parviennent.
En parallèle, les acteurs de la vente on line sont arrivés au terme d'une phase de croissance de leur activité et souhaitent se lancer dans les magasins physiques. Nous assistons donc à une convergence accrue entre commerce on line et off line et, en fin de compte, à l'émergence du commerce connecté intelligent.
- Quelles sont les avancées produites par l'alliance de Suning, acteur du brick and mortar, et de son ancien rival Alibaba?
Il s'agit d'une alliance gagnant-gagnant. Alibaba est un géant de la vente en ligne tandis que Suning domine l'univers du commerce off line. C'est comparable à un rapprochement entre Amazon et Wal-Mart. Suning a ainsi accès à un grand nombre d'internautes, tandis qu'Alibaba bénéficie du système logistique de Suning et de ses 4000 points de vente.
De même, Suning est en passe de devenir le premier vendeur de la plateforme Tmall d'Alibaba. L'investissement des acteurs on line dans le on line est une tendance forte, pour preuve le récent exemple d'Amazon rachetant Whole Foods. Nous nous félicitons d'avoir réalisé ce rapprochement il y a deux ans déjà.
Joshua Xiang, VP de Suning Commerce (Alibaba figure au nombre de ses investisseurs), GM de Suning Research, sera présent lors de la journée China Connect, pour sa première édition à Shanghai, le 5 juillet 2017. Le dirigeant s'exprimera sur le retail et, plus particulièrement, sur les innovations apportées par l'intelligence artificielle.
Parmi les autres intervenants figureront notamment Ken Hong GM, Business Strategy & International BD de Weibo, Jim Qian, e-commerce manager de Bacardi China, Keane HE, e-commerce director de Lacoste China, et Christine Wang, general manager, e-commerce greater China de Publicis Commerce.