[Étude de cas] Supercut, le renouveau italien de la mercerie en ligne
Après un déménagement en Italie, Marine Crenn a ouvert une boutique en ligne de tissus, Supercut. Elle propose aux Italiens de découvrir la "French touch" tout en proposant à sa clientèle étrangère les grandes marques italiennes.
Je m'abonneÀ 39 ans, Marine Crenn a déjà eu trois carrières professionnelles distinctes. Elle a travaillé durant plusieurs années dans le milieu de la voile pour des skippers renommés comme Ellen MacArthur ou Jean-Luc Nélias.
À la suite de sa première grossesse, elle change de secteur professionnel et travaille pour la Commission européenne puis pour la ville de Quimper. Marine Crenn revient pour nous sur son aventure dans l'e-commerce en Italie avec sa mercerie Supercut.
Comment vous est venue de créer Supercut, votre site italien de mercerie en ligne ?
En 2011, mon mari, ingénieur naval, a été recruté par une entreprise italienne spécialisée dans la fabrication de bateaux. Nous nous sommes alors installés à Bergame, en Lombardie. Je ne parlais pas italien, j'avais deux enfants en bas âge et j'étais confrontée à la crise économique en Italie.
Aussi, je voulais développer ma propre activité et je m'étais mise à la couture. J'ai constaté une absence d'offres dans la mercerie en ligne sur le marché italien. J'ai donc eu l'idée de lancer Supercut, en septembre 2013, un site marchand "trendy".
Vous vous êtes lancée dans un marché de niche sans aucune expérience professionnelle dans le secteur de la mercerie en ligne, pourquoi ce choix?
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Je suis de nature fonceuse, ayant fait de la voile en compétition ! Quand je me lance dans un projet, je n'ai pas peur de prendre des risques. La couture à la maison est un secteur en pleine expansion, non seulement en Italie mais aussi en Europe et aux États-Unis. À l'origine, je n'étais pas forcément une bonne couturière, ni une experte en textile mais je cherchais justement un marché de niche où je serais la première en Italie.
Pourquoi avez-vous choisi le Web ?
Pour des raisons pratiques concernant la garde de mes enfants : en Italie, l'école termine à 15h et vous n'avez pas de garderie. En étant sur le Web, je pouvais être à la maison. Pour ma plateforme e-commerce, j'ai choisi PrestaShop, en raison de la quantité de produits que je souhaitais mettre en ligne.
La barrière de la langue a été compliquée à gérer?
Lors de mon arrivée en Italie, j'ai pris des cours en italien aussi lors du lancement du site, mon niveau était suffisant. Par contre, pour la rédaction d'articles sur mon blog, j'ai eu plus de difficultés. Je procède de manière détournée : les blogueuses et artistes designer répondent à mes interviews par écrit, afin d'obtenir des articles bien rédigés.
Comment avez-vous fait pour vous faire connaître ?
Ayant travaillé dans la communication, c'était vraiment ma valeur ajoutée. J'ai contacté des blogueurs tout en démarchant la presse. Je me suis rendu dans des salons de loisirs pour communiquer sur Supercut. Et enfin, j'ai beaucoup investi Facebook où nous recensons 10 000 fans, grâce en partie à l'achat de publicités, et Instagram avec près de 3 500 personnes. Dans la mercerie, vous avez en effet une forte communauté sur les réseaux sociaux, car les personnes aiment partager leurs créations. J'ai également lancé avec l'aide d'une Italienne un blog de rencontres entre couturières.
Néanmoins, j'imaginais que pour être visible en ligne la communication serait suffisante en occultant de travailler mon référencement naturel. Je me suis rendu compte de mon erreur, aussi depuis l'année dernière, j'ai lancé mon blog.
Quels sont les marchés que vous avez ciblés ?
En Italie, le marché de la couture n'existe pas, alors qu'en France, nous avons beaucoup de créateurs de tissus, de patrons, etc. je propose ainsi aux Italiens cette "French touch", en l'élargissant aux créateurs anglais, japonais... À l'inverse, je vends à ma clientèle étrangère des tissus de la haute couture italienne.
Mon public est composé à 80% de particuliers et à 20% de professionnels, créateurs et magasins. Un segment que je souhaite augmenter. La clientèle étrangère représente 30% de mon chiffre d'affaires, et la France 5 à 10%.
Comment avez-vous procédé pour le sourcing des produits ?
Au début, j'ai beaucoup regardé les sites marchands français. Aujourd'hui, je collabore avec une quinzaine de marques, en privilégiant de plus en plus les créateurs italiens. J'ai la chance d'habiter dans une région, La Lombardie, réputée pour son industrie textile haut de gamme. Je me rends chez les grossistes et je rachète les fins de collection de grands créateurs : Marc Jacobs, Vivienne Westwood, Martin Margiela, etc. Ils sont vendus au minimum au tiers de leur valeur marchande réelle. Néanmoins, j'ai dû effectuer un long travail avec les fournisseurs pour installer une relation de confiance. Le site compte entre 500 à 800 produits. J'essaie d'avoir une rotation de stocks importants pour avoir régulièrement des nouveautés.
Pour l'envoi des colis, l'un des plus importants budgets de ma société, je travaille avec un groupe franco-suisse qui achète des volumes d'expédition chez les grands noms de la logistique (UPS, TNT, etc.), cela me permet d'obtenir des tarifs moins chers.
Avez-vous rencontré des difficultés ?
Quand j'ai débuté, j'ai acheté des produits en trop grosses quantités. Maintenant, j'ai appris à connaître les goûts de ma clientèle italienne et donc à mieux maîtriser mes stocks. J'ai appris seule dans l'e-commerce, j'ai donc commis des erreurs. Par exemple, je n'avais pas compris que je devais mettre des mots-clés, faire du référencement naturel... Par ailleurs, mon site n'est pas adapté pour le mobile, c'est un chantier que je dois lancer.
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Quels conseils donneriez-vous à une personne qui se lancerait dans l'e-commerce à l'étranger ?
J'ai effectué une étude de marché pour savoir si mon offre serait viable. Je me suis également beaucoup appuyée sur les réseaux d'entrepreneurs français en Italie, c'est rassurant de pouvoir partager ses expériences. Il ne faut pas hésiter à choisir des prestataires français surtout si vous ne maîtrisez pas bien la langue et le mode de fonctionnement du pays où vous êtes.