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La grande complexité des retours produits pour les retailers

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La grande complexité des retours produits pour les retailers

Devenu un phénomène massif, le retour des produits ou reverse logistique est désormais perçu comme naturel aux yeux des consommateurs. Côté retailer, la gestion de ces retours est loin d'être un fleuve tranquille en raison de sa grande complexité logistique. Le point sur la situation.

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Exception il y a une vingtaine d'années, le retour produit est désormais un geste anodin, voire banal. Pourquoi ? En grande partie grâce à l'expansion de l'e-commerce. Selon les acteurs interrogés, les retours produits en France provenant des sites web représentent en moyenne 20 à 30 % des achats, contre 8 % de ceux effectués en magasins.

« Nous sommes tous des consommateurs qui aiment essayer les produits désirés, notamment dans l'industrie du textile/fashion. Or, dans l'e-commerce qui est par définition virtuel, la possibilité d'essayer n'existe pas... sauf lorsque le retailer propose une stratégie de retour produit après l'acte d'achat » , souligne Tanguy Caillet, SVP Global Industry Solutions, o9 Solutions.

Pour rappel, la législation en France autorise les consommateurs à bénéficier d'un retour possible sous 14 jours pour des commandes passées en ligne, retour qui peut aussi être envisagé après un achat en magasin, si le produit n'est pas conforme ou comporte un vice caché. Libre ensuite à chaque entreprise de décider de sa propre stratégie commerciale liée au retour produit. Une pratique qui a d'ailleurs mis du temps à se répandre en France... à la différence des USA où le retour produit a toujours été considéré comme un service "normal". Et que dire de l'Allemagne où les retours gratuits sont désormais légiférés ?

Fusion entre commerce classique et e-commerce

Le retour fait donc partie d'un cycle global et normal de la vie d'un produit. Un phénomène d'autant plus vrai que les canaux entre les points de vente physiques et digitaux se sont "rapprochés", comme le mentionne Laurent Giet, SVP Cloud Sales France de Salesforce : « Un client sur trois recherche d'abord le produit en ligne sur son mobile avant de l'acheter en magasin. Par ailleurs, 80 % des clients sont d'abord allés chercher sur le site avant de se rendre sur le lieu de vente (selon le retailer CURRYS, concurrent de FNAC/Darty en Angleterre). Inversement, un tiers des consommateurs vont d'abord en magasin avant d'acheter le produit visé en ligne. Plus criant encore, le client n'hésite pas à scanner les QR codes sur place pour obtenir davantage d'informations sur le produit ciblé. Ou encore, 6 commandes sur 10 en ligne impliquent la présence d'un magasin physique qui aide à passer la commande (via le click & collect par exemple) ».

Désormais naturel pour les consommateurs, ce phénomène des retours est pourtant loin d'être évident à mettre en place pour les retailers. La faute à une gestion logistique très complexe à organiser.

Un contexte particulier en pleine évolution

Le reverse logistique est désormais particulièrement vaste et s'est répandu parmi de très nombreuses familles de produits (mode, high-tech, etc.). Plusieurs facteurs l'expliquent.

Avant la crise Covid, les retours ont été grandement facilités par la gratuité entreprise par des géants de la grande distribution en ligne, Amazon en tête. Le site américain a en effet révolutionné en grande partie la livraison et le retour gratuits. La crise sanitaire a ensuite "fait son oeuvre" en entraînant une forte demande des achats en ligne, notamment dans l'univers textile/fashion pour lequel des problématiques de taille/couleur/coupe/goût sont omniprésentes.

Ces achats ont par ailleurs permis de nouveaux modes de consommation (via l'abonnement ou la location) engendrant des retours produits à la fin du temps écoulé. Sans compter la tendance au recyclage des produits et la pression exponentielle des enjeux environnementaux qui participent également à la massification des retours produits.

Une problématique très large

Un reverse logistique qui est donc soit initié par les retailers, soit poussé par les clients consommateurs. Or, les problématiques à gérer sont multiples : entre la livraison classique, les réassorts de produits vis-à-vis des magasins, la faculté d'avoir un minimum de stock en permanence... de nombreuses équations sont à résoudre. Quelle quantité dois-je prévoir pour mes différents magasins ? Quelle quantité sera retournée par les clients ? Où vont-ils être retournés et, une fois retournés, où les produits doivent-ils être revendus ? Dans le même magasin ou dans un autre ?

« En dépit de toutes ces interrogations, les retailers cherchent de plus en plus à rendre vertueux à la fois un modèle de livraison et de reprise des flux. Sans faire abstraction du coût économique, ils cherchent des solutions qui permettent de prendre en charge l'ensemble de leurs besoins, et notamment les flux de reverse logistique », remarque Antony Catillon directeur de Logissimo.


Liste non exhaustive des différents cas de retours

Les plus fréquents sont ceux qui proviennent des plateformes e-commerce avec des retours orchestrés sur les points relais et via la Poste. Erreurs de commande, produits défectueux, produits non conformes, SAV... de nombreux cas sont possibles.

Autre tendance, les retours suite à des commandes "massives" : le client achète volontairement plusieurs produits quasi identiques afin d'être certain d'avoir le bon modèle. Une pratique bien connue dans l'univers fashion par exemple, ou encore dans le high-tech dans une moindre mesure.

Les retours liés au principe de la consigne (reprise de contenant type bonbonne de gaz, plateau-repas, bouteille d'eau en verre, etc.), ou sur des produits en fin de vie pour le recyclage, sont également très fréquents. Des organismes qui d'ailleurs démarchent pour aller chercher les produits, ce qui a pour conséquence d'accélérer cette dynamique de "reverse".


Planification et modèles de prévisions vs historique de commandes

Les enjeux liés à la planification sont au coeur de la problématique supply chain en s'appuyant donc, non seulement sur une anticipation basée sur des ventes normales ou classiques, mais également sur les futurs retours.

« Il est primordial pour un retailer d'avoir une visibilité sur la quantité de stock qui revient dans ses locaux/entrepôts afin d'éviter de devoir racheter les produits et éviter un surplus », souligne Tanguy Caillet.

En premier lieu, il convient d'avoir un angle de type modèle de prévision, renforcé par du machine learning (ou apprentissage automatique) en prenant en compte le pourcentage de retours attendus. Sans oublier d'y ajouter le travail effectué sur les typologies de clients.

Conséquence, un stock provisionné autour des produits susceptibles de revenir peut-être déterminé et chiffré. Produits qui seront potentiellement disponibles à nouveau à la vente après reconditionnement. Une condition cependant : que la stratégie déployée de gestion du stock soit commune au sein du retailer, « or, ils ont trop tendance à mettre en place cette stratégie... chacun de leur côté », déplore Tanguy Caillet.

Par ailleurs, faut-il se baser sur les historiques de commandes ? Oui et non ! Il s'agit certes d'une première étape importante, mais qui reste immature. Prendre en effet en compte le passé pour se projeter vers le futur relève d'une stratégie qui a fait ses preuves dans les années 2000, puisque les gammes de produits étaient moins étendues et moins complexes qu'aujourd'hui. A priori, ce n'est plus possible. Les données se sont grandement multipliées.

Pire, les années Covid se sont immiscées et il est nécessaire de "nettoyer le passé" de ces années puisqu'elles ne peuvent pas être considérées comme des années classiques, comme le fait remarquer Laurent Giet : « Ces années de pandémie ont quelque peu faussé la donne. De surcroît, les données sont tellement complexes à analyser qu'il n'est plus possible de se baser uniquement sur un historique de commandes pour anticiper les prochaines. Or, de gros efforts sont faits de la part des retailers pour s'entourer de data scientists capables d'analyser ces données, du moins sur le papier, car les défis technologiques restent présents ».

Difficultés autour de la gestion des stocks

Par ailleurs, "l'embarras" des retours produits se pose aussi lorsqu'ils sont faits dans un magasin différent de celui où ils ont été achetés. Comment s'assurer qu'ils peuvent être remis en stock après avoir été examinés et reconditionnés le cas échéant ?

« Peu de marques sont capables de tracer ce type de retour en raison de la grande difficulté à identifier le produit. Une des solutions est de pouvoir mettre en place un entrepôt qui unifie, en un même lieu, les retours produits et que tous les systèmes imbriqués (logiciels front office de vente, ERP, CRM, logiciels supply chain etc.) soient interconnectés via des API adéquats. C'est très complexe, une véritable usine à gaz à coordonner. Seules les entreprises équipées d'un outil de type OMS sont en mesure d'identifier en temps réel le retour produit, même dans le cas d'un produit de luxe acheté à New York puis retourné à Paris », explique Laurent Giet, SVP Cloud Sales France de Salesforce.

Tracker le produit "en vie" durant tout son parcours représente donc un défi majeur. Selon les acteurs interrogés, outre l'acquisition de logiciels de type OMS, WMS ou encore TMS, la solution consiste à réaliser une indexation entre le flashage du produit (en fonction de ses caractéristiques), sa typologie et son retour en stock.

L'intégration des retours produits doit également se "jouer" dans la stratégie de retour elle-même. Quand doit-on accepter un retour ? Quand le refuser ? À quel moment le retailler dit au client qu'il peut faire revenir le produit ? Et même dans certains cas de figure, le retailler peut décider de ne pas le reprendre. Il préfère rembourser le client tout en acceptant une autre commande. Or, pour en arriver à ce cas "extrême", il est nécessaire de s'appuyer sur des algorithmes qui calculent le seuil d'acceptabilité de ces retours, comme peut notamment le faire Amazon.

Les limites des retours produits

Une complexité globale qui n'est pas sans conséquence sur le futur des retours produits. En effet, de plus en plus d'enseignes commencent à les facturer afin d'en limiter le trafic.

« Selon les estimations des acteurs de la supply chain, un retour produit coûte entre 15 et 30 euros. En conséquence, les retailers provisionnent le coût de ces retours dans leur compte de résultat entre 2 à 3 %. Avec un dilemme à la clé : satisfaire le client ou faire payer le retour du produit dont il ne veut plus ? », constate Guillaume Jonglez, Senior Director Retail Transformation EMEA chez Oracle.

H & M vient d'annoncer vouloir tester les retours payants dans certains pays. L'addition ? Entre 2,50 et 5 euros. Plus radical, Amazon de son côté n'hésite plus à évincer les clients qui usent et abusent des retours. Autre stratégie, celle qui consiste à analyser les comportements des clients qui utilisent les retours.

Ainsi, certains retailers proposent désormais des retours produits gratuits... mais seulement en magasin.

.Avantages ? « Les retours peuvent être traités localement par les vendeurs. Une fois vérifiés, les produits peuvent être remis en rayon. En revanche, lorsque le produit repart par un autre circuit logistique, des coûts de traitement nettement supérieurs sont constatés », affirme Nicolas Peraldo, directeur des comptes stratégiques Oracle Retail.

Dernier volet à considérer, celui sur la stratégie à adopter vis-à-vis du client en termes de compensation lors du retour. Dois-je rembourser le client, lui faire un avoir, lui proposer un échange, etc. ? Finalement, la logistique des retours doit entrer dans une nouvelle ère, mais cela requiert une organisation réfléchie, agile et en évolution permanente. Rien n'est figé... à l'exception peut-être de ce que l'on peut considérer comme "l'ère du jetable" qui semble avoir été définitivement enterrée.


Seconde vie des produits : les grands magasins en 1re ligne

Quelques années après le lancement du label interne Go for Good, le groupe Galeries Lafayette a mis en place à Paris 700 m2 consacrés aux produits de seconde main et à la mode responsable/circulaire. Dénommé le (re) store, ce laboratoire d'envergure est situé au coeur de son vaisseau amiral du Boulevard Haussmann dédié aussi bien aux produits dits "accessibles" qu'à ceux de luxe. Un espace accompagné par des services inédits de (re) vente et de (re) cyclage pour donner une seconde vie.

Printemps n'est pas en reste avec son grand magasin également situé boulevard Haussman. Son "7e Ciel" s'est installé sur un nouvel étage au sommet du bâtiment Mode Femmes, dédié à la mode circulaire, au vintage et à la seconde main. Déployée sur 1 300 m2, cette nouvelle partie du magasin s'installe dans deux espaces épurés et forme une des plus grandes superficies au monde réservée
à cette nouvelle économie.

 
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