Yohan Ruso, fondateur de Praditus.com : "les salariés doivent prendre le temps de réfléchir à leur avenir"
Créée par Yohan Ruso, ancien directeur général chez eBay, Praditus est une plateforme digitale visant à aider les individus à progresser dans leur vie professionnelle. Regroupant 40 000 utilisateurs, le portail revendique un service bien plus complet que les bilans de compétences traditionnels.
Je m'abonneQuelle est la particularité de Praditus ?
En latin, Praditus signifie "Être doué". Praditus.com une plateforme de progression professionnelle dont la vocation est d'aider les gens à progresser dans les strates de leur vie professionnelle. Aujourd'hui, en entreprise, la gestion des talents concerne avant tout les hauts potentiels, autrement dit 5% des individus. Ces heureux élus disposent des meilleurs outils sur le marché en matière d'accompagnement, mais les 95% restant, qui ont besoin de mieux gérer leur employabilité, n'ont pas grand-chose à disposition. Dans le même temps, nous vivons dans un monde qui présente une certaine urgence économique, et les entreprises ne se posent plus la question de savoir ce qu'un employé fera dans 10 ans. Concernant les ressources humaines, ce n'est plus un marché de la gestion, mais un marché de la compétence. Et le jour ou l'individu n'est plus en adéquation avec la compétence recherchée par l'entreprise, elle recrute quelqu'un d'autre, sans forcément réfléchir à la manière dont peuvent évoluer les salariés.
Comment est née l'idée d'une telle plateforme ?
L'idée m'est venue notamment grâce à mon expérience de directeur général France chez eBay. J'étais très intéressé par l'observation et l'accompagnement des salariés dans leur parcours professionnel, et eBay disposait de gros moyens en la matière. D'importants investissements étaient réalisés afin d'améliorer la performance de l'organisation, afin de proposer des formations aux managers, etc, mais eBay a toujours rappelé à ses salariés que chaque individu doit prendre le temps pour réfléchir à son avenir, et que si cette démarche personnelle n'est pas effectuée, peu importe le montant des investissements en formation, ça ne servirait à rien.
"Il existe aujourd'hui un déséquilibre entre la fonction RH de plus en plus experte, et des salariés toujours aussi perdus"
Il faut que l'individu se prenne en main. Or, aujourd'hui il existe un déséquilibre entre la fonction RH, de plus en plus expert et disposant d'outils de plus en plus sophistiqués, et des salariés toujours aussi perdus, notamment lorsqu'ils doivent parler d'eux-mêmes. Et pourtant il est nécessaire d'anticiper ces problématiques. Nous avons voulu utiliser toute la science disponible sur le sujet, pour la mettre à disposition des individus grâce au digital.
Comment êtes vous parvenus à développer Praditus, et quel est son fonctionnement ?
Nous avons la particularité d'avoir en interne trois chercheurs spécialisés en psychométrie (la science de la mesure des traits de personnalité), qui construisent et valident les tests mis au point. Aujourd'hui les tests de personnalité existant n'analysent qu'une seule dimension de l'individu. On se différencie de cela à plus d'un titre. Tout d'abord, nous sommes accessible à tous, facilement, grâce à l'interface très graphique de notre plateforme. Cela va à l'encontre des tests de personnalité classiques qui bien souvent, sont indigestes.
Aussi, notre modèle est complet : nous analysons évidemment la personnalité, mais aussi les facteurs de motivation, le type d'intelligence que l'individu possède, et l'intelligence émotionnelle. Il y a également un test pour mesurer le stress et la gestion du stress, et un test d'intérêt de métier. Nous regardons également les environnements organisationnels de la personne, et tentons de comprendre les raisons ayant motivé le choix du type d'environnement. L'idée ici, étant de déterminer s'il y a une différence entre l'environnement organisationnel du salarié au moment où il passe les tests, et celui auquel il inspire. Tous nos tests durent 7 à 8 minutes, et un test réalisé dans sa globalité nécessite environ 50 minutes. Au total, nous avons identifié 27 archétypes organisationnels et 27 archétypes individuels.
Qui ciblez-vous prioritairement ?
Notre population d'utilisateurs se compose majoritairement des 20-30 ans. Nous avons principalement deux cas d'usage sur notre plateforme. Tout d'abord, les trentenaires ayant travaillé environ 5 à 7 ans, et qui se retrouvent à un moment charnière de leur carrière professionnelle. Ceux-là se posent des questions sur leur parcours : doivent-ils s'orienter vers un poste d'encadrement ou plutôt une fonction d'expert, l'entreprise a-t-elle des ambitions de progression pour le salarié, comment gérer les priorités entre le commencement d'une vie de famille et le travail, etc. Et d'autre part, il y a les plus jeunes, âgés d'une vingtaine d'années, et qui viennent d'être diplômés. Cette population cherche davantage à se projeter dans leur carrière professionnelle. Nous pouvons là aussi les aider.
Quel modèle économique avez-vous imaginé ?
Pour notre cible BtoC, et l'outil est complètement gratuit. Pour les universités et les écoles ça l'est également. En revanche, notre cible BtoB, à savoir les entreprises, l'outil sera payant, mais nous n'avons pas encore défini le pricing, qui devrait être mis en place dès septembre 2015. Enfin, nous réfléchissons à mettre en place des ressources externes comme des formations ou des ouvrages spécialisés, une fois les tests passés par l'individu, qu'on pourrait lui proposer pour progresser. L'idée étant de faire le lien entre ces ressources externes et les attentes de l'individu. Ceci dit, ce n'est pas là un modèle économique prioritaire pour nous, plutôt une source de revenus additionnelle. In fine, nous avons bon espoir d'être rentables d'ici fin 2016. C'est relativement court car nous n'avons pas une structure de coûts très lourde.