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DossierMarketplaces: un levier de croissance majeur pour l'e-commerce

Phénomène majeur de ces dernières années, la France -autrement baptisée le pays des marketplaces- compte de nombreuses plateformes au sein du paysage des acteurs du retail. Tour d'horizon en France, à l'international et du côté des éditeurs de solutions de marketplaces.

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Marketplaces: un levier de croissance majeur pour l'e-commerce

1 Les marketplaces, un atout majeur de l'e-commerce

"Le développement des places de marché montre la capacité de l'e-commerce à révolutionner en permanence ses pratiques, souligne Marc Lolivier, directeur général de la Fevad. Le commerce en ligne s'est construit sur un paradigme très complexe: s'améliorer en permanence tout en étant sans cesse benchmarké, via une élasticité des prix très faible. Le seul moyen d'y arriver est d'innover." La marketplace réalise finalement ce que le commerce fait depuis toujours, elle permet d'augmenter les volumes et de financer ses investissements. En 2003, Amazon est ainsi le premier e-commerçant à proposer des offres concurrentes aux siennes à des marchands tiers, après avoir expérimenté le modèle aux États-Unis dès 2000. Puis en 2005, eBay, Rueducommerce, Priceminister, Pixmania, des plateformes de pure intermédiation, se lancent également dans ce nouveau format. "Les sites en ligne arrivent à capter un trafic d'audience extrêmement important mais avec des taux de transformation relativement faibles -en moyenne de l'ordre de 3%-, analyse Marc Lolivier. D'où l'idée d'élargir leur offre grâce aux marketplaces pour satisfaire leur clientèle."

Les e-commerçants ont vite compris qu'ils disposaient d'un levier de développement important en monétisant leur audience, via un taux de commission. Ils ont ainsi mis leur audience à disposition des autres marchands. Aujourd'hui, cette bascule vers la marketplace n'est plus l'apanage des pure players. Les retailers ont suivi, symbole de leur conversion à l'e-commerce via la reprise de ses codes. "Nous distinguons deux modèles distincts dans les places de marché, celui des pure players comme Rakuten ou eBay qui ne font que de l'intermédiation, et le modèle mixte ou hybride désignant à la fois des sites marchands et des plateformes", explique Marc Lolivier.

Top 30 des marketplaces en France

Méthodologie: Classement réalisé sur le base du CA estimé de ces plateformes. Foxintelligence opère le plus grand panel consommateurs d'Europe sur l'e-commerce (plus de 500000 consommateurs suivis en temps réel) et s'appuie sur les données anonymisées et agrégées contenues dans les emails de confirmation de commande des membres de son panel. 200 marchands sont ainsi couverts et Foxintelligence dispose des moyens de distinguer les ventes en propre (1P ou retail) des ventes de vendeurs tiers (3P ou marketplace).

2 Une agrégation d'offres à moindre coût

Le format marketplace est devenu une composante essentielle du modèle économique des sites marchands. "Au début, cela a pu sembler un peu contre-intuitif de proposer des offres en tant que commerçant de ses concurrents, note le directeur général de la Fevad, Marc Lolivier. Néanmoins, aujourd'hui, dans le top 15 des sites e-commerce, 100% ont une marketplace." La place de marché permet ainsi à n'importe quel retailer d'élargir son interface à de nouvelles catégories ou d'augmenter le nombre de références. "Elle constitue également un moyen d'être plus fortement en compétition avec Amazon", souligne Edouard Nattée, fondateur de Foxintelligence, plateforme de consumer intelligence à destination de l'e-commerce.

Les distributeurs se sont rendu compte que la place de marché leur permettait d'étendre et d'approfondir l'offre proposée à moindre coût, puisqu'ils ne sont pas propriétaires de la marchandise. Ils n'ont pas à référencer les produits ni à gérer le pricing ou la logistique (pour certains). L'occasion également de tester l'appétence des clients sur une nouvelle catégorie. "La marketplace est devenue un incontournable, note Arnaud Cartigny, vice-président en charge des activités conseil pour le secteur Retail de CGI Business Consulting. Elle fait partie du package de services qu'une enseigne en France doit proposer à ses clients, au même titre qu'un site e-commerce, du click-and-collect, etc." L'e-commerçant maximise ainsi les chances que le consommateur achète sur son site marchand via l'exhaustivité de son offre tout en faisant office de tiers de confiance. Sur l'année 2020, les marketplaces ont progressé, en moyenne, de 27%, soit deux fois plus vite qu'en 2019. En moins de dix ans, leur poids dans le volume d'affaires global de l'e-commerce n'a cessé de s'accroître: de 8% en 2012 à 32% en 2020.

En moins de dix ans, leur poids dans le volume d'affaires global de l'e-commerce n'a cessé de s'accroître: de 8% en 2012 à 32% en 2020.

3 Se différencier de ses concurrents

L'an dernier, des enseignes comme Leroy Merlin ou Maisons du Monde se sont également lancées. Cette multitude de places de marché pose la question de leur différenciation pour les consommateurs. "Les commerçants en ligne se distinguent sur trois axes: l'expérience client (ergonomie et navigation sur le site, moyens de paiement, service client...), le pricing et les services additionnels comme une offre logistique intégrée", pointe Arnaud Cartigny (CGI). Pour se différencier de la concurrence et capter les meilleurs vendeurs et les fidéliser, de plus en plus de plateformes (Amazon, Cdiscount, ManoMano...) proposent leurs offres de fulfillment, soit l'externalisation de la logistique et gèrent également la reverse logistic. Elles peuvent ainsi mutualiser leurs frais et mieux négocier avec les transporteurs afin d'amortir leurs coûts.

"Avec la technologie et l'offre, la logistique est un élément essentiel de l'activité e-commerce, souligne Thomas Métivier, directeur de la marketplace, du développement et de l'international de Cdiscount. Grâce à notre expertise logistique, nous sommes capables d'expédier plus de 23 millions de colis par an et de livrer directement dans plus de 20 pays en Europe. Notre service de fulfillment permet à nos 2 500 vendeurs français et internationaux de nous déléguer le stockage et la livraison de leurs commandes." De son côté, Rakuten développe le click-and-collect avec ses partenaires commerçants.

Autre axe de différenciation, la sélection des produits. "Une enseigne comme Maisons du Monde mise sur la qualité des articles sélectionnés dans sa marketplace, explique Edouard Nattée (Foxintelligence). D'autres privilégient au contraire le volume et des produits à bas prix tels que Wish ou Aliexpress (des plateformes souvent critiquées pour des contrefaçons ou des articles non conformes aux annonces, NDLR ). Et au milieu, les places de marché où les utilisateurs jouent le rôle de vérificateur de la qualité comme Amazon."

4 L'émergence des plateformes locales avec la crise sanitaire

En 2020, la fermeture des commerces, en raison de la crise sanitaire, a été un déclencheur de leur nécessaire digitalisation pour nombre d'entre eux via l'émergence de plateformes locales. Le digital est devenu un élément de survie et plus uniquement un axe de développement du business. "La crise a été l'occasion de franchir le pas pour les commerces de proximité, souligne Flavien Vottero, directeur d'études chez Xerfi. Ces derniers ont pu trouver des solutions sur mesure par l'intermédiaire des places de marché." Le plus souvent positionnées sur l'alimentaire comme Epicery, Pourdebon, Tekkers, elles mettent en relation des producteurs locaux (bouchers, maraîchers, fabricants de confitures...) avec les acheteurs.

La crise sanitaire a renforcé l'accent local souhaité par les consommateurs. "L'offre reste, néanmoins, très fractionnée, il manque un leader d'audience et il s'agit d'ailleurs d'une brèche que peuvent exploiter les acteurs de la grande distribution pour répondre à cette demande, analyse Flavien Vottero. Monoprix est ainsi entré dans le capital d'Epicery en 2017. Nous commençons à constater cette logique chez Carrefour et Leclerc, qui se positionnent via leur marketplace."

Les enjeux de la nouvelle réglementation de l'UE en 2021

À partir de juillet, la TVA pour les importations hors UE sera payée directement par la plateforme. En outre, la révision des dispositifs de subventions à l'importation depuis les pays en développement va permettre aux pays importateurs de fixer eux-mêmes leurs tarifs postaux. "Les produits d'une valeur inférieure à 22?euros dans l'Union européenne ne seront plus exonérés de TVA", indique Flavien Vottero, directeur d'études chez Xerfi. Les plateformes deviendront responsables de la qualité et de la conformité des transactions. Le texte de la Commission européenne maintient, néanmoins, le principe d'une responsabilité adaptée aménagée. La marketplace n'est pas responsable comme un vendeur mais la mesure introduit plus de responsabilité, notamment des obligations de transparence sur le statut de chacun afin qu'il n'y ait pas de confusion dans l'esprit du consommateur. "Le règlement européen prévoit le renforcement de la responsabilité des marketplaces, explique le directeur général de la Fevad, Marc Lolivier. C'est un point sur lequel nous sommes vigilants car si on réintroduit le même niveau de responsabilité qu'un vendeur, le taux de commission sera plus important. Il n'y a donc plus d'intérêt à passer par un intermédiaire."

Phénomène majeur de ces dernières années, la plateformisation du commerce s'est ancrée dans le paysage mondial de la consommation. L'ensemble des grands acteurs du retail présents sur le Web possèdent leur propre plateforme.

5 Marketplace: quel éditeur pour quel besoin ?

Choisir son éditeur de marketplace implique d'opérer un retour sur sa stratégie: s'agit-il d'une plateforme spécialisée ajoutée à un site e-commerce existant, ou d'un site totalement indépendant? Dans le premier cas, "le volume d'affaires peut augmenter de 30 à 50% en deux ans", avance Eric Alessandri, CEO de l'éditeur Wizaplace. Or, lorsque l'on dépasse le seuil au-delà duquel les charges fixes sont couvertes, la marge pour l'opérateur (gestionnaire de la marketplace, à distinguer des marchands) s'élève à 100% car il n'y a ni frais de stockage ni coûts fixes attachés à chaque vente.

Parmi les éditeurs de moyenne ou grande taille (les acteurs low cost s'adressant qu'aux débutants, sur de faibles volumes), deux visions coexistent: le modèle "standalone", permettant de gérer la marketplace de la gestion de commande jusqu'à l'envoi des marchandises, et le système par briques indépendantes, en complément d'un développement en interne ou intégré à un écosystème. Un opérateur parallèlement e-commerçant traditionnel peut ainsi créer son outil front office. L'éditeur Izberg, propriété du groupe Open depuis 2018, propose cinq modules: outil de gestion des vendeurs, gestion des catalogues, gestion des commandes, gestion financière et dashboard de reporting. "Notre différence majeure par rapport à des outils tels que Wizaplace est notre technologie full API, capable de s'interfacer avec tous les systèmes existants, à l'image de Magento, tous les modules périphériques à la gestion, comme les PSP, les PIM et les agrégateurs de flux", explique Thierry Dufresne, VP sales et marketing d'Izberg. L'éditeur Saas, dont la solution gère plusieurs milliers de marchands et plusieurs millions de produits, compte parmi ses clients Veepee, Alstom (via une plateforme B to B), Suez, Total et Aéroports de Paris.

Le leader du marché, Mirakl (dont la solution est également en full API), fort de 300 clients au sein de 40 pays, dont Carrefour, Galeries Lafayette, Leroy Merlin, Toyota, met en avant sa robustesse: "Tous nos clients combinés rassemblent 40000 vendeurs, affirme Luca Cassina, EVP Customer Success-EMEA de Mirakl. Durant le Black Friday, nous avons totalisé 160?millions de chiffre d'affaires et n'avons été confrontés à aucune latence." Depuis 2019, le hub Mirakl Connect offre une plateforme sur laquelle les vendeurs peuvent s'enregistrer directement afin de se proposer aux opérateurs (propriétaires des différentes marketplaces), une marketplace des marketplaces, en quelque sorte. La?particularité de Mirakl tient à son offre uniquement back office. La solution s'adresse donc en priorité aux e-commerçants d'envergure, déjà en possession d'une plateforme front office opérationnelle.

Enfin, Wizaplace, fondé en 2012, mise sur une solution standalone composée de trois briques: back office dédié à l'opérateur, back office destiné aux vendeurs et front office pour les consommateurs. "Les deux tiers de nos clients optent pour les trois modules, un tiers connecte son application front à nos API", indique Eric Alessandri, CEO de Wizaplace. Parmi ce dernier tiers figurent des front offices gérés par Magento, Prestashop, Salesforce Cloud Commerce ou des solutions personnalisées (c'est le cas d'Engie). L'éditeur, lequel compte parmi ses clients Cash Converters, le Club Avantage de la Macif, l'enseigne de jardinerie Villa Verde, BNP Paribas, est compatible avec des agrégateurs de flux tels que Lengow, Iziflux, Shoppingfeed ou BeezUP, les solutions de merchandising Predigo ou Netwave et les PSP Hipay, Stripe et Natixis Payment. Par ailleurs, Wizaplace offre une volumétrie de vendeurs et de produits importante, à l'image de Mirakl: "Nous avons récupéré des marketplaces après qu'elles ont abonné leur solution pour des problèmes de volumétrie, à l'instar de Macif", se réjouit Eric Alessandri. La marketplace la plus importante parmi les clients de Wizaplace atteint 50000 vendeurs professionnels (le chiffre grimpe à 900000 pour des vendeurs particuliers).

Cdiscount lance son offre de marketplace

L'e-commerçant Cdiscount se lance dans la bataille des éditeurs de marketplace et propose dorénavant sa propre solution. Son offre est modulable: Cdiscount développe une partie front end ou est en capacité de pluguer son back-office (à destination des vendeurs et de l'opérateur) à un front existant. Un outil de gestion des commandes et du service client est également disponible. Concernant le volet livraison, en fonction du vendeur et du mode de livraison souhaité par le client final, les commandes sont orientées vers le vendeur ou le service logistique de Cdiscount, permettant de livrer le jour même ou le lendemain. Enfin, la solution comprend un module de modération ainsi qu'un outil de gestion de catalogue. Les gestionnaires de catégorie de la disposent d'un back-end permettant de filtrer le catalogue des vendeurs Cdiscount selon des critères tels que le scoring, le prix, le pays, la marque, la catégorie, pour constituer un assortiment unique. Les opérateurs qui disposent déjà d'un PIM peuvent fusionner leur offre en propre et l'offre élargie aux vendeurs Cdiscount. L'offre clé en main adresse ainsi l'intégralité du cycle de vente.

6 Quid du PIM et de la recherche à facettes?

Autres critères à prendre en compte, la présence d'un PIM (product information management, solution permettant d'améliorer la gestion de son catalogue) et l'efficacité de la recherche à facettes (permettant de filtrer les produits affichés en fonction d'une liste de critères). Parmi les éditeurs étudiés, Mirakl et Wizaplace se distinguent, Wizaplace grâce à son PIM intégré et Mirakl à travers sa solution Mirakl Catalog Management, complémentaire au PIM. "Cet outil aide à consolider les données produits en provenance de plusieurs vendeurs, explique Luca Cassina (Mirakl). Les différentes sourVoicices sont prises en compte pour créer une seule fiche produit." Plusieurs vendeurs peuvent ainsi être référencés sous un même produit mais afficher des photos différentes.

À titre de comparaison, le PIM de Wizaplace permet au marchand et à l'opérateur de construire toute leur base de catalogue. La solution récupère également les données depuis des bases de données comme Icecat ou Cnet ou depuis les agrégateurs de flux, à l'instar de Lengow. À noter, certaines solutions, comme Wizaplace, permettent l'enrichissement de catalogue en données unifiées (une seule fiche produit pour plusieurs vendeurs, avec des textes et photos identiques) et la création d'offres différenciées sur une même fiche produit.

Développer en interne ou faire appel à un éditeur?

Un e-commerçant d'envergure doit-il nécessairement confier le développement de sa marketplace à un éditeur?? Sur ce point, les acteurs se divisent. Premier frein, la pérennité d'un développement réalisé en interne?: lorsque l'équipe qui a développé la plateforme quitte l'entreprise, la perte de connaissances est inévitable. Pour Eric Alessandri, CEO de Wizaplace, développer une solution de marketplace en interne n'a de sens que pour les entreprises dont les spécificités métier ne sont pas couvertes par les solutions du marché?: " Faire appel à une solution existante permet de gagner deux ans de développement et 1?million d'euros de budget ". Par ailleurs, Wizaplace propose un service de conseil, baptisé Professional Services. Selon son dirigeant, les clients qui y ont recours obtiennent un taux de conversion supérieur à 2,5?%, soit 50?% de plus que ceux qui ne bénéficient pas de ses conseils. Un service similaire, animé par une équipe "customer success", est proposé par le leader du marché Mirakl, et par Izberg. Si tous les éditeurs ne communiquent pas leurs tarifs, il importe de choisir un?modèle de tarification adapté?: Mirakl indexe ses tarifs sur le succès de la marketplace et prend une commission sur les ventes. Izberg facture un "setup fee" (coût d'initialisation) ainsi qu'une licence annuelle définie en fonction du volume d'activité, calculé en fonction du nombre d'offres à gérer et du volume d'affaires transitant par la plateforme, et un pourcentage du volume d'affaires. Le client règle un coût de licence minimum si le volume d'affaires est inférieur au montant minimum de la licence. Enfin, Wizaplace repose sur un modèle différent, fondé sur un abonnement annuel, sans commission sur les ventes. Le coût (de 35?000?à 150?000 euros pour les projets les plus importants) est lié à la consommation technique de la solution, avec un premier palier à 50?000 commandes.

Le choix concernant le faceting, ou recherche à facettes, s'avère plus simple: la plupart des éditeurs utilisent Algolia, un moteur de génération de facettes sous forme de solution Saas. Grâce à cet outil, le consommateur bénéficie de la fonction "instant search": lorsque l'internaute veut voir tous les produits rouges, par exemple, la page se met à jour instantanément, sans temps de rechargement, via un système de cache. "Pour y parvenir, nous indexons autant de fois les catalogues qu'il y a de façon d'effectuer la recherche", résume Eric Alessandri (Wizaplace).

7 L'automatisation: la course à l'échalote

Par ailleurs, la question de l'automatisation divise les éditeurs. Izberg, notamment, réfléchit à des cas d'usage avec ses clients: "Nous cherchons à simplifier la vie des vendeurs et des opérateurs pour traiter de très grosses volumétries de données: par exemple, un moteur capable d'accepter ou rejeter automatiquement les vendeurs, un autre voué à optimiser la mise en avant des produits (en fonction de la marge qu'ils génèrent, de leur taux de retour...)", s'enthousiasme Thierry Dufresne, VP sale et marketing d'Izberg. Au sein de Mirakl, deux axes de développement cohabitent: l'amélioration de la gestion du catalogue et la lutte contre la fraude. Ainsi, lorsque la couleur d'un produit n'est pas renseignée, l'intelligence artificielle peut la déduire des photos.

À l'inverse, si Wizaplace travaille sur l'IA depuis 2019, Eric Alessandri se montre plus pessimiste: "Ni nous ni aucun autre éditeur du marché ne possède d'outils très intéressants en termes d'intelligence artificielle", affirme-t-il. Selon l'éditeur, aucun n'atteint le niveau de productivité d'un humain, pour l'heure. Il prédit toutefois des gains de productivité spectaculaires dans les trois ans à venir.

En parallèle des éditeurs de marketplaces à proprement parler, des solutions telles que Shopify ou Magento permettent aux e-commerçants de lancer leur activité en ligne. Le modèle diffère des plateformes traditionnelles, gérées par un opérateur. "Shopify (partenaire de 300000?marchands en Europe) enrichit un App Store de plus de 4100 applications afin de créer continuellement de nouveaux modules pour aider les marchands?: marketing, traductions, suivi des colis en temps réel, optimisation du processus de livraison, mais aussi reporting, gestion du panier d'achat et des promotions, personnalisation de l'expérience client, solutions de paiement", décrit Emilie Benoit-Vernay, Country Manager de Shopify France. Les marchands peuvent utiliser cet écosystème pour construire eux-mêmes leurs front et back offices. Pour les marketplaces B to B (lesquelles connaissent une hausse de 38%, selon l'Observatoire des marketplaces publié par Mirakl, Roland Berger et Webhelp) comme B?to?C, l'avenir est au shop in shop au à la mise en valeur des vendeurs, via la mise à leur disposition d'outils de marketing. Ainsi, "Alstom a créé une marketplace baptisée Station One, spécialisée dans la vente de pièces détachées dans l'univers ferroviaire, explique Thierry Dufresne (Izberg). Dès qu'un nouveau fournisseur rejoint la plateforme, cela donne lieu à une communication spécifique, afin de renforcer l'attractivité de toute la marketplace." Plus avant-gardiste, au Japon, une boutique spécialisée dans la vente d'oeufs sur Rakuten permet au consommateur de retrouver la poule qui a pondu l'oeuf qu'il achète via son numéro d'identification. Sur Alibaba, un marchand d'huile d'olive peut même montrer ses oliviers en train de pousser via une webcam. Quand la massification du commerce via les marketplaces rejoint la tendance à la consommation locale.

"Les solutions logicielles demeurent très généralistes"

Quentin le Brouster, cofondateur et CTO de BackMarket, explique son choix de réaliser tout le développement de la marketplace en interne.

Avez-vous choisi de développer votre marketplace en interne ou faites-vous appel à un éditeur de marketplaces?

Nous avons décidé de développer notre marketplace en interne ex nihilo. C'est le conseil que nous donnerions à toute marketplace voulant se lancer sur une verticale précise, telle que le reconditionné. Les solutions logicielles sont très généralistes et ne permettent pas, par exemple, d'intégrer un compteur du CO2 économisé pour chaque achat. Nous sommes aujourd'hui 150 collaborateurs sur la partie technique et produits, pour une plateforme rassemblant 1500 vendeurs et plus de 50000 produits.

Quelles fonctionnalités innovantes avez-vous développées?

Nous ajoutons plus de 80 fonctionnalités par trimestre. Parmi les évolutions: l'ouverture dans quatre pays (Royaume-Uni, Pays-Bas, Autriche et Finlande), l'ouverture du Japon en début d'année (traduction automatique de l'inventaire), la création d'une application mobile permettant au client final de diagnostiquer l'état de son téléphone après réception. Nous remplissons ainsi notre rôle de tiers de confiance et incitons nos consommateurs à vérifier la qualité du produit. Nous attribuons ensuite un score de qualité aux marchands. Ces derniers sont sélectionnés grâce à un algorithme qui vérifie le meilleur rapport qualité-prix. Les plus compétitifs sont affichés sur la marketplace.

Comment s'interface votre solution de marketplace avec le système de paiement en ligne et l'enrichissement des données produits?

Nous travaillons avec plusieurs PSP, notamment Adyen, PayPal et Stripe. Nous avons la main sur notre tunnel de paiement. Nous voulons nous absoudre de cette dépendance aux PSP et devenir PSP agnostiques. Cette année, nous essayons la solution d'Akeneo pour le PIM. Une partie sera toutefois conservée en interne.


Recherche à facettes, PIM, automatisation, compatibilité avec les autres acteurs de l'écosystème... La multitude de paramètres à prendre en compte dans le choix d'un éditeur de marketplace constitue souvent une source de confusion pour les opérateurs.

8 "Nous offrons aux vendeurs français un accès à 190 pays"

Vous indiquez que 99% des entreprises sur eBay exportent, comment l'expliquez-vous ?

eBay est la seule place de marché en France à offrir aux vendeurs français un accès à 190 pays, et par ailleurs la première marketplace transfrontalière en Europe (rapport Cross-Border Commerce Europe Top 100 Marketplaces). Les vendeurs nous choisissent pour nos opportunités d'exportation. Ils peuvent sélectionner eux-mêmes les pays qu'ils souhaitent adresser, sans contrainte. Nous ne sommes pas un distributeur de produits, aussi nous ne leur ferons jamais concurrence. Notre plateforme n'a d'autre objectif que la conversion des ventes de nos vendeurs. Aujourd'hui, près de 26 000 entreprises françaises, dont une majorité de TPE-PME, développent leurs ventes en France et à l'export sans aucun investissement financier.

Quels sont les dispositifs mis en place pour les aider à vendre à l'international ?

Nous mettons à la disposition des vendeurs un set d'outils et d'informations dans l'Espace vendeurs afin de leur permettre d'analyser leurs ventes et leur compétitivité face aux concurrents, de traduire leurs annonces pour accéder à de nouveaux marchés (Webinterpret), de gérer et d'anticiper les expéditions, et des outils promotionnels pour gérer le trafic et l'attractivité de leur offre.

Quel est le volume global de ces marchands à l'international ?

Aujourd'hui, 99% des vendeurs professionnels français sur eBay exportent et adressent en moyenne 25 marchés hors de la France. 83% des 26 000 vendeurs français exportent sur plus de 10 marchés et 72% sur plus de quatre continents.

83% des 26 000 vendeurs français exportent sur plus de 10 marchés et 72% sur plus de quatre continents.

Les principales destinations sont l'Allemagne, les États-Unis, l'Italie, la Grande-Bretagne et la Belgique. Les cinq catégories de produits les plus exportées regroupent les pièces auto, les antiquités, les objets de collection, les jouets/jeux ainsi que les vêtements, chaussures et accessoires. La majorité des transactions se font à l'export : plus d'une transaction sur deux s'effectue entre un acheteur et un vendeur situés dans deux pays distincts.

Y a-t-il eu un engouement lors des confinements ?

Devant l'ampleur de la crise de la Covid-19, eBay a décidé de renforcer les mesures facilitant l'accès à la plateforme pour les nouveaux vendeurs: zéro commission sur les ventes jusqu'à 3 mois, zéro euro de frais de boutique de 6 à 12 mois, ouverture de boutique en ligne sans frais et sans engagement, assistance téléphonique personnalisée et adhésion gratuite au programme d'aide au commerce physique toujours ouvert sur eBay. Nous avons obtenu plus de 800% nouvelles inscriptions de commerçants sur eBay lors du deuxième confinement. Notre plateforme recense aujourd'hui 26000 vendeurs professionnels français. eBay est la seule marketplace à avoir mis en place un programme de soutien au commerce physique depuis avril 2019 (1 vendeur sur 5 possède une boutique physique). Côté ventes, nous avons observé une accélération des catégories tech, pièces et accessoires auto ou maison et jardin à l'export comme en domestique ainsi que tous les produits liés au télétravail et au bricolage (jardinage, bricolage réparation auto, petit électroménager...).

Quels sont vos axes de différenciation ?

eBay ne réussit que si ses vendeurs réussissent. Nous soutenons le commerce physique grâce à des initiatives comme "Toujours Ouvert sur eBay" qui facilite la digitalisation des boutiques. Notre marketplace est la moins chère du marché français avec une commission de vente entre 3 à 8% du prix final de l'objet selon les catégories. Notre plateforme est un tremplin de croissance à coûts et à risques réduits car la commission n'est prélevée qu'en cas de vente, un potentiel de croissance pour des dizaines de milliers de petites et moyennes entreprises en France. Le classement des annonces se base sur des critères objectifs et fonctionne "au mérite": sont ainsi mis en valeur les vendeurs offrant le meilleur service à leurs clients et la plus grande fiabilité. Les vendeurs créent leurs propres fiches produits et leurs annonces ne sont pas agrégées dans un catalogue imposé. eBay propose enfin des tarifs de livraison négociés avec des leaders du marché comme Chronopost ou Mondial Relay et une plateforme de retours simplifiée.

Sarah Tayeb, responsable du pôle vendeurs chez eBay France, supervise toutes les opérations des particuliers et des professionnels depuis le site français de la plateforme. En 2020, la première place de marché en Europe a observé une hausse de 390% du nombre de vendeurs français.

9 La marketplace, une porte d'entrée vers l'international

Marbotic réalise 98% de son chiffre d'affaires à l'international

En 2015, Marie Mérouze crée un jeu composé de dix chiffres en bois que les enfants manipulent en suivant des instructions ludiques sur une tablette pour apprendre à compter, additionner ou encore multiplier. Elle commercialise son produit sur son site mais les ventes décollent réellement lorsqu'elles intègrent les marketplaces d'Amazon, Fnac, Cdiscount en 2016. Via le programme Launchpad (visant à valoriser les produits innovants de start-up), la dirigeante part à la conquête de la France, de l'Europe mais aussi des États-Unis avec le service "Expédié par Amazon" (le commerçant livre ses produits à Amazon, qui les stocke et se charge de l'emballage et de l'expédition). "Nous visions dès le départ l'international et notamment l'Amérique du Nord, explique-t-elle. La marketplace d'Amazon nous a permis de nous lancer sur le marché américain où le taux d'équipement en tablettes bien supérieur à la France ouvrait d'importantes opportunités."

Progressivement, elle décline son concept et traduit ses jeux dans plusieurs langues. Résultat, sa petite société bordelaise, qui emploie désormais 16 personnes, réalise dès 2017 plus de 80% de son chiffre d'affaires à l'export (États-Unis, Canada, Nouvelle-Zélande, Australie, Europe du nord et Benelux), la part est aujourd'hui de 98%. "Notre entreprise ne pourrait pas vivre sans l'international, souligne Marie Mérouze. L'ouverture d'une boutique en ligne sur une place de marché est assez simple en raison de l'exhaustivité des outils disponibles (traduction des fiches produits, conseils pour la protection de sa marque, etc.). Néanmoins, il est important de prendre en compte les spécificités culturelles et la gestion de la supply chain au niveau mondial (vérifier la disponibilité de ses stocks dans chacun des pays concernés)."

Marbotic n'a pas ouvert d'antenne aux États-Unis mais a embauché, en 2020, un responsable du marketing digital franco-américain pour revoir les fiches produits, le contenu, les visuels, les influenceurs locaux... "La crise sanitaire a complexifié les ventes physiques, aussi nous avons renforcé le canal digital et plus particulièrement les marketplaces qui font plus que jamais partie de nos axes de développement à l'international", pointe la dirigeante.

Dodow mise sur le fulfillment

En 2014, Pierre-Luc, Gui et Alexandre, trois amis parisiens, créent un galet lumineux diffusant une lumière au plafond pour faciliter l'endormissement, Dodow (plus de 700 000 exemplaires vendus). En juin?2016, ils se lancent via le programme Launchpad d'Amazon à l'international. "Le support logistique d'Amazon, Fulfillment by Amazon, était pour nous un argument fort, pointe Gui Perrier. La marketplace nous a ouvert des opportunités de marché auxquelles nous n'aurions pas pu prétendre immédiatement en étant seuls. Nos produits étaient disponibles dans l'ensemble des pays où Amazon est présent."

La place de marché leur a offert un accompagnement sur l'ensemble des actions menées sur le site: intégration de la page et création du listing produits, opportunités de communication, visibilité et accompagnement lors d'événements promotionnels, déploiements logistiques dans les autres pays grâce au programme Expédié par Amazon Pan-Européen (Royaume-Uni, Allemagne, Italie, Espagne) ainsi qu'aux États-Unis et au Canada. L'international représente aujourd'hui 80% de leur chiffre d'affaires. "Nous avons accentué nos efforts sur le marketing au vu de nos produits nécessitant des explications pédagogiques par rapport à d'autres", indique Gui Perrier. Aujourd'hui, les trois dirigeants se servent également de la logistique d'Amazon pour envoyer leurs propres commandes de leur site marchand.

Pour les commerçants, la place de marché donne une visibilité non seulement au niveau national mais aussi à l'international. Elle permet de tester l'appétence du marché à leur offre en minimisant les risques d'investissement. Témoignages de deux sociétés françaises.

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